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Intervention de Michèle Alliot-Marie

Réunion du 25 mars 2010 à 9h30
Présence de l'avocat dès le début de la garde à vue — Discussion d'une proposition de loi

Michèle Alliot-Marie, ministre d'état, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, je crois, s'agissant des problèmes de la garde à vue, qu'il faut tout d'abord insister sur ce point : nous partageons, sur les divers bancs de cette assemblée, les mêmes constats.

Premièrement, il y a trop de gardes à vue, la procédure n'étant pas toujours utilisée dans l'esprit dans lequel elle a été créée.

Deuxièmement, les conditions de garde à vue sont trop souvent indignes, malgré les efforts de chacun et sans qu'il s'agisse, de quelque manière que ce soit, en disant cela, de montrer du doigt les policiers ou les gendarmes.

Troisièmement, l'avocat n'a pas la possibilité de jouer totalement son rôle, notamment son rôle de conseil, au cours de la garde à vue.

Je pense que nous sommes unanimes à penser cela.

Bien entendu, sur le fondement de ce constat, des propositions sont faites pour essayer de résoudre ces problèmes.

La proposition de loi de M. Vallini est effectivement l'une des réponses susceptibles d'être données. Elle prévoit que toute personne placée en garde à vue, si elle en fait la demande, soit immédiatement assistée d'un avocat, et ce pendant toute la durée de la garde à vue.

Je voudrais tout d'abord remercier M. Vallini de sa contribution à la réflexion et de sa proposition. Je veux d'ailleurs lui dire que j'entends bien tenir compte de ses réflexions et de ses travaux dans le cadre de la concertation que je mène à propos de la réforme de la procédure pénale.

Je note également que d'autres propositions, abondant dans le même sens même si elles présentent des variantes, ont été déposées, au nombre, me semble-t-il, de six ou sept. Cela peut d'ailleurs nous amener à réfléchir sur notre façon de travailler et sur le travail parlementaire.

Nous aurons l'occasion de reparler de l'ensemble de ces sujets.

Vous dites, sur tous les bancs, que le travail parlementaire est parcellaire et que, souvent, les petites réformes s'accumulent, nuisant ainsi à la cohérence et à la visibilité des textes. Or la méthode consistant à examiner la question de la garde à vue, laquelle n'est qu'un des aspects de la procédure pénale et notamment du déroulement de l'enquête, est trop parcellaire. Cela ne nuit en rien à la réflexion sur le fond mais, à mon sens, la démarche doit être autre.

Si nous voulons que nos concitoyens comprennent les transformations que nous apportons, les réformes, la modernisation que nous souhaitons, notamment en matière de justice, nous ne devons pas faire se succéder de petits textes ; nous devons envisager les problèmes dans leur ensemble. C'est ce que nous faisons avec la réforme de la procédure pénale afin qu'elle soit totalement cohérente et compréhensible pour tout le monde.

Selon moi, en dehors de toute polémique – il n'y en a pas vraiment sur le fond –, notre réflexion sur la garde à vue doit s'inscrire dans une approche globale de la procédure pénale. Dans ce cadre, la question particulière de la présence de l'avocat lors de la garde à vue devra également prendre en compte, comme vous l'avez mentionné, monsieur le rapporteur, l'ensemble des paramètres de l'enquête judiciaire. Par conséquent, il vaut mieux que nous travaillions ensemble sur la réforme de la procédure pénale, puisque c'est dans ce cadre que s'inscrit la question de la présence de l'avocat.

J'ai eu l'occasion de le dire, notamment en commission, la réforme que nous proposons constitue une refondation de la procédure pénale. Nous examinons tout, de la commission des faits jusqu'aux voies d'exécution. Il est important de montrer, à travers cette réforme, que notre objectif est d'écouter ce que nous disent nos concitoyens sur des procédures qu'ils estiment trop longues et incompréhensibles ; ils ressentent un déséquilibre entre leur propre position et celle de la machine judiciaire. Nous devons entendre le sentiment de la défense, mais aussi celui des victimes, qui ont elles-mêmes l'impression de ne pas être écoutées.

Mon but, à travers la réforme de la procédure pénale, est d'assurer l'équité de l'enquête, de renforcer la protection des droits et des libertés à toutes les étapes de la procédure et de trouver un meilleur équilibre entre le droit des victimes et les garanties de la défense. Estimant qu'il s'agit d'un point essentiel pour que nos concitoyens aient confiance dans leur justice et dans leur justice pénale, j'ai lancé une très vaste concertation comprenant les spécialistes, les syndicats de magistrats, les associations d'avocats, mais aussi les syndicats de policiers, les représentants des gendarmes et les représentants des associations de victimes.

C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité que nous travaillions non sur des concepts, mais de la façon la plus claire possible sur un « pré-texte » rédigé. Car un texte déjà rédigé est un texte auquel on n'échappe pas, où il ne peut y avoir d'imprécisions. C'est pourquoi le projet lui-même a déjà été élaboré de façon extrêmement ouverte : en dehors des magistrats et des avocats y participent également des universitaires et des parlementaires, de la majorité comme de l'opposition, à qui j'ai proposé d'essayer de rédiger le meilleur texte possible. Toutefois, même si nous élaborons le texte qui nous semble le meilleur possible, certains éléments peuvent nous échapper. Aussi, après cette rédaction déjà ouverte, j'ai souhaité que la concertation permette à chacun de s'exprimer.

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