L'instauration d'une obligation d'amortissement minimal du capital et de vérification périodique de la solvabilité de l'emprunteur, que je vous proposerai d'ailleurs de renforcer encore, fera du crédit renouvelable un outil plus sûr.
Si la réforme du taux d'usure proposé à l'article 1erA devrait en outre permettre de rééquilibrer la part respective du crédit renouvelable et du prêt personnel, elle ne devrait pas pour autant diminuer l'attrait du premier qui constitue un outil de financement très populaire, plébiscité par les consommateurs. Il en va de même des cartes de crédit renouvelable associées à des cartes de fidélité : si la séparation des fonctions paiement et avantages promotionnels était indispensable afin de garantir une réelle liberté de choix au consommateur, aller plus loin en exigeant une séparation physique des cartes n'apporterait rien de plus et serait une erreur économique. Or, dans le contexte actuel, ce n'est pas ce dont nous avons besoin.
J'insisterai en revanche sur la nécessité d'être extrêmement vigilant sur la prévention du risque de basculement des ménages dans le surendettement. C'est un aspect auquel je suis très sensible, comme vous tous, car ces familles surendettées, perdues, désemparés, nous les rencontrons tous les jours dans nos circonscriptions. C'est pourquoi nous avons voulu travailler, avec la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, Mme Valérie Rosso-Debord, à la fois sur la prévention de ces situations, sur leur prise en charge et sur les alternatives au crédit classique.
Plusieurs dispositions ont ainsi été adoptées en commission sur la suspension des procédures d'exécution diligentées contre les ménages surendettés, sur la durée des plans de redressement, ramenée de dix à huit ans, ou encore sur la définition du microcrédit. Sur ce dernier point, je vous proposerai d'ailleurs d'aller plus loin afin de favoriser l'essor de cet instrument ; notamment en permettant le financement du microcrédit par les particuliers, comme l'a indiqué Mme la ministre.
Avant de conclure, je souhaiterais souligner qu'il appartient aussi aux professionnels, banques, établissements spécialisés mais également enseignes commerciales, de faire plus pour les consommateurs, qui sont peut-être leurs débiteurs, mais qui sont avant tout leurs clients. Si les dispositions du projet de loi peuvent leur paraître contraignantes, et elles le sont, à dessein, elles les conduiront peut-être aussi à renouveler leur modèle économique où le risque apparaît trop souvent comme acceptable car provisionné. Mais où, également, en se contentant d'appliquer des ratings impersonnels, on restreint l'accès au crédit de manière injustifiée. Bien sûr, au niveau global, cela n'empêche pas les banques et l'économie de fonctionner, mais ce raisonnement reste inacceptable au niveau individuel. Les professionnels disposent donc de marges de progression évidentes pour apporter de meilleures solutions de financement à leur clientèle : souhaitons que ce projet de loi les incite à y travailler.
La question de l'adéquation entre besoins de financement et apports de crédit pose évidemment la question du fichier positif, dernier point que je souhaiterais évoquer. En effet, un des bénéfices attendus de la création d'un tel fichier est une meilleure analyse du risque individuel présenté par l'emprunteur susceptible de lui permettre un meilleur accès au crédit ; l'autre bénéfice attendu étant une diminution du surendettement. Je me suis longuement interrogé sur l'opportunité de recourir à un tel fichier et nous avons eu, à l'occasion de l'examen d'un amendement déposé par M. Éric Diard et d'un amendement de l'opposition, un débat long et constructif sur ce thème en commission. Les auditions que j'ai menées, notamment celles de la CNIL mais aussi celles de la société Experian, qui gère de tels fichiers à travers le monde, ne m'ont personnellement pas convaincu de la pertinence de cet outil pour réduire le surendettement ; c'est également ce que démontrent les chiffres publiés dans le cadre d'expériences étrangères. Il en va peut-être autrement pour ce qui est de favoriser l'accès au crédit.
Toutefois, les avantages potentiels d'un fichier positif doivent être mis en balance avec ses inconvénients, l'intérêt général qui pourrait en être retiré avec l'atteinte à la vie privée qu'il risquerait d'entraîner. C'est pourquoi le rapport prévu à l'article 27 bis, qui doit désormais être remis dans un délai de dix-huit mois, et non de trois ans, me paraît nécessaire pour y voir plus clair dans les arguments avancés à l'appui ou à l'encontre du fichier positif. En outre, il m'apparaît indispensable de pouvoir juger de l'efficacité du FICP en temps réel avant de franchir l'étape suivante qui pourrait être celle du fichier positif. Je proposerai en revanche d'étendre le champ de l'étude à un registre qui comprendrait non seulement les crédits à la consommation mais l'ensemble des crédits non professionnels.
Voilà, en substance, les points qu'il me paraissait important d'évoquer avant que nous ne passions au débat. Sur un sujet aussi fondamental que la protection des consommateurs et aussi sensible pour les Françaises et les Français, je considère que le projet de loi apporte des améliorations concrètes dont les effets seront, j'en suis persuadé, rapidement perceptibles dans la vie quotidienne de nos concitoyens. Sous réserve de l'adoption des quelques amendements que je souhaite vous proposer, je vous invite donc, mes chers collègues, à apporter votre soutien à ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et Nouveau Centre.)