Il semble effectivement urgent de faire quelque chose pour le relancer. Mais mettre le dossier médical sur une clé USB ne nous semble pas la solution. Il est même à craindre que cela n'enterre le DMP.
Dans le principe, on ne peut qu'approuver l'objectif d'un dossier médical recensant toutes les données d'un patient et accessible aux médecins qui le suivent, même si, dès le départ, ce DMP repose sur une grave ambiguïté : est-ce un outil au service de la santé du patient ou un outil de contrôle au service de l'assurance maladie ? Le principal obstacle au DMP est-il une question d'outil ou tient-il plutôt au sens que l'on veut donner à cet outil ? Ces questions doivent être débattues et tranchées.
Bonne idée dans son principe, le DMP se heurte, dans la pratique, à des difficultés d'ordre technique et à d'autres ayant trait à la protection de la vie privée. Avant d'expérimenter l'hébergement de ce dossier sur clé USB, il est donc nécessaire de surmonter ces obstacles, car cette expérimentation ne le permettra pas, se contentant d'en ajouter de nouveaux.
D'ailleurs, cette nouvelle expérimentation s'inscrit, vous le savez, dans une longue série d'échecs. En 1985 et 1986 a été expérimentée la carte santé pour le centre hospitalier de Blois, les cliniques privées et les médecins libéraux environnants. En 1988, ce fut Santal, à Saint-Nazaire, puis la carte Vitale 2 avec son volet santé. Si l'on doit retenir une seule leçon de ces échecs successifs, c'est que, pour qu'un tel dispositif fonctionne, il faut non seulement qu'il soit au point techniquement, mais aussi que ceux qui doivent l'utiliser, les patients et les médecins, y trouvent un avantage, un intérêt réel.
Concernant le dossier médical sur clé USB, ces deux conditions ne nous paraissent pas remplies. On a vu que les défauts inhérents au dossier médical personnalisé concernaient également la clé USB, mais d'autres problèmes techniques viennent encore s'ajouter.
Les patients auxquels l'expérimentation de ce dispositif sera proposée sont des patients « lourds », en ALD, ayant par conséquent un dossier médical volumineux. Or la mémoire des clés USB ne semble pas suffisante à l'heure actuelle pour accueillir toutes les données de ces patients, notamment celles de l'imagerie médicale.
Par ailleurs, les contraintes de sécurité et de moyens financiers semblent antinomiques. Il est prévu que le dossier médical sur clé USB soit sécurisé par un dispositif biométrique. Il existe certes des clés dotées d'un lecteur d'empreintes digitales, mais elles coûtent cher, nettement plus que l'estimation avancée de huit euros pièce.