Monsieur le président, monsieur le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, mesdames, messieurs les députés, vous êtes aujourd'hui appelés à examiner la proposition de loi relative au développement des sociétés publiques locales.
Je tiens, d'emblée, à préciser deux éléments de contexte. Tout d'abord, si cette proposition émane du Sénat, je dois mentionner que votre rapporteur, M. Jean-Pierre Schosteck, avait également déposé une proposition de loi similaire. J'ai ensuite noté le consensus dont ce texte a fait l'objet au Sénat, celui-ci l'ayant adopté à l'unanimité. Tout cela dénote une initiative parlementaire qui fédère les différents groupes politiques et je mesure donc la forte volonté du Parlement de proposer des outils nouveaux aux collectivités locales.
Cette proposition de loi vise, en effet, à apporter aux collectivités territoriales un nouvel outil juridique pour exercer les compétences qui leur sont confiées par la loi.
Comme vous l'avez relevé, monsieur le rapporteur, les collectivités territoriales et leurs groupements sont à l'origine de près des trois quarts des investissements publics dans notre pays. Dans les domaines de l'aménagement urbain, des grands équipements, du transport, du logement, du tourisme, leur action est ainsi essentielle.
Pour mettre en oeuvre leurs interventions, les collectivités territoriales et leurs groupements bénéficient déjà d'une large palette d'outils, dont certains ont récemment été simplifiés ou modernisés à l'initiative du Gouvernement. Je citerai, notamment, les sociétés d'économie mixte locale, bien établies dans le paysage juridique et local ; les contrats de partenariat public-privé, qui permettent de faire émerger les projets des collectivités et de trouver les financements nécessaires à leur réalisation ; les décrets du 19 décembre 2008 relevant les seuils des procédures formalisées pour les marchés de travaux ainsi que ceux relatifs aux dispenses de publicité et de mise en concurrence, ce qui donne plus de réactivité et de souplesse aux élus locaux ; la loi du 17 février 2009 sur l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics privés qui s'inscrit dans le cadre du plan de relance et qui permet dorénavant aux conseils municipaux d'accorder délégation au maire concernant les marchés, quel que soit leur montant ; enfin, pour en revenir au sujet qui nous occupe aujourd'hui, la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, qui a permis aux collectivités territoriales et à leurs groupements de créer, à titre expérimental pour une durée de cinq ans, des sociétés publiques locales d'aménagement dont elles détiennent l'intégralité du capital. Ces sociétés peuvent conduire des opérations d'aménagement au sens du code de l'urbanisme.
L'initiative parlementaire que nous examinons aujourd'hui propose de développer cet outil, d'une part, en pérennisant les sociétés publiques locales d'aménagement et en élargissant leurs compétences, d'autre part, en créant des sociétés publiques locales aux compétences élargies, avec un domaine d'intervention calqué sur celui des sociétés d'économie mixte. Cette évolution tire profit des récents progrès de la jurisprudence dite « in house » de la Cour de justice des Communautés européennes.
Si le Gouvernement est favorable à cette évolution, il demeure très attentif à la fiabilité du cadre juridique proposé.
En effet, cette proposition de loi a pu susciter des inquiétudes de la part de certains acteurs économiques qui craignent que les missions et prestations de services publics échappent aux règles de mise en concurrence prévues par le droit communautaire. Une saisine ultérieure de la Cour de justice de l'Union européenne n'est d'ailleurs pas totalement à exclure et rien ne serait plus désastreux pour les collectivités territoriales qu'un outil juridiquement peu fiabilisé.
C'est pourquoi le Gouvernement a introduit des amendements en première lecture au Sénat permettant d'harmoniser le champ d'intervention des futures sociétés publiques locales avec la jurisprudence communautaire. C'est aussi la raison pour laquelle il soutient sans réserve les précisions apportées par votre rapporteur, à travers les amendements que nous examinerons dans quelques instants.
Rappelons quelques principes fondamentaux : premièrement, à l'instar des sociétés publiques locales d'aménagement, les futures SPL ne devront exercer leurs activités que pour leurs seuls actionnaires ; deuxièmement, la présence d'établissements publics parmi les actionnaires de la société est exclue, suite à l'adoption au Sénat d'un amendement gouvernemental ; troisièmement, la jurisprudence communautaire exige que le contrôle opéré par l'autorité publique soit analogue à celui qu'elle exerce sur ses propres services. À défaut, le juge communautaire estimerait que le lien de type « in house » entre la personne publique et la société serait rompu.
Votre proposition de loi reprend ainsi les différents concepts dégagés par la jurisprudence « in house », qui déroge aux principes du droit communautaire et s'examine au cas par cas.
J'espère que cette sécurisation suffira à lever les incertitudes, bien qu'on ne puisse totalement exclure tout risque de contentieux ultérieur, notamment compte tenu du très large champ d'application que vous avez voulu donner aux sociétés publiques locales. Il conviendra d'ailleurs d'inviter les collectivités territoriales qui auront recours à ce nouvel outil à rester particulièrement vigilantes dans l'objet et le fonctionnement des SPL qu'elles mettront en place. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et Nouveau Centre.)