À mon tour, je me réjouis que nous puissions enfin débattre de ce texte. Mais, si les animateurs du mouvement sportif peuvent se féliciter de l'introduction de plus de morale dans le sport, n'oublions pas qu'ils s'inquiètent par ailleurs des possibilités qu'auront désormais les collectivités territoriales de continuer à les soutenir !
Le souci de l'éthique est, je pense, partagé sur nos bancs. La loi de 2000 étant insuffisamment contraignante, je me félicite des dispositions de cette proposition de loi sur les incompatibilités, la suppression des agents personnes morales, l'encadrement des agents étrangers, le renforcement des sanctions et la protection due aux mineurs.
Cependant, je doute de la totale efficacité de ce texte dans la mesure où il ne traite pas de la gestion des clubs eux-mêmes, ni de la question des transferts. Le président de l'UEFA, Michel Platini, a eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises : dans l'Union européenne, un certain nombre de clubs sont en situation de faillite, en Grande-Bretagne notamment. Tant que des clubs serviront – heureusement pas dans notre pays – à blanchir de l'argent ou seront utilisés par certaines multinationales étrangères, le danger de dérive persistera. Par conséquent, aider l'UEFA à contrôler l'ensemble des clubs européens sera certainement le moyen le plus efficace de moraliser l'afflux de l'argent dans le football professionnel. Comme vous l'avez dit, monsieur le rapporteur, cela pose la question de la compétence de l'Union européenne : obtenir que le sport fasse l'objet d'un traitement spécifique au niveau de l'UE sera un travail de longue haleine.
Ce texte m'inspire trois inquiétudes.
D'abord, il donne un pouvoir aux ligues professionnelles en matière de suivi de l'activité des agents de joueurs. Comme l'a dit Valérie Fourneyron, la ligue est un ensemble de clubs professionnels ; un président de ligue peut avoir des responsabilités dans un club et donc être contrôleur et acteur dans le même temps. À mon avis, laisser la responsabilité aux seules fédérations de veiller à l'éthique de la profession d'agent sportif serait beaucoup plus raisonnable, d'autant que les fédérations principalement concernées en ont les moyens.
Ensuite, la proposition de loi introduit la possibilité d'une rémunération de l'agent par le club. En rendant le club juge et partie et le joueur dépendant de son club, cette disposition fait peser des dangers sur le parcours sportif des joueurs – on sait combien les questions de calendrier, de transferts, etc. importent pour leur intégrité physique et sportive. J'ai déposé plusieurs amendements à ce sujet.
Enfin, les avantages fiscaux en matière de cotisations sociales permis par le dispositif vont ajouter une nouvelle niche au profit des clubs professionnels.
Madame la Présidente, vous avez exprimé la crainte que des dispositions plus contraignantes ne défavorisent notre pays par rapport à d'autres dans l'Union européenne. Or l'expérience le montre, lorsque la France a été à l'avant-garde sur des sujets comme l'éthique et le dopage, d'autres pays ont suivi. Si elle prend aujourd'hui des dispositions plus contraignantes en ce qui concerne les agents, on peut penser que ce sera encore le cas, tout au moins au sein de l'Union européenne.