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Intervention de Martine Martinel

Réunion du 25 février 2010 à 15h00
Prévention et répression des violences faites aux femmes — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Martinel :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission spéciale, mes chers collègues, parler des violences faites aux femmes, parler de ce qui les nourrit c'est, à un moment ou à un autre, inévitablement, parler d'éducation dans la famille et à l'école. S'il nous est impossible d'intervenir dans la sphère privée, il nous revient légitimement de le faire dans le domaine scolaire.

Il est urgent que la notion d'égalité des sexes soit un objet d'étude dans les programmes scolaires. Je suis heureuse, à ce propos, que la proposition de loi dont nous débattons aujourd'hui ait été enrichie en commission par un amendement de Mme Buffet à tendant compléter l'enseignement d'éducation civique délivré à nos enfants par un enseignement relatif à l'égalité entre les sexes et par une sensibilisation aux violences faites aux femmes. Il me semble ainsi que nous comblerons une lacune que les familles ne peuvent pas toujours pallier, hélas !

L'éducation est la clé de voûte d'un projet plus vaste de prise de conscience de notre société de ce mal qui, comme cela a été dit précédemment, touche absolument toutes les classes sociales et les enfants par incidence. En effet, dans près de 70 % des cas, les actes de violence se déroulent devant eux, et ils les concernent directement dans 10 % des cas, avec des séquelles physiques et psychologiques comparables à celles de leur mère. Comme le précise le rapport Henrion, « la violence dont l'enfant est témoin a les mêmes effets sur lui que s'il en était victime », et « ces enfants sont susceptibles de reproduire la violence, seul modèle de communication qu'ils connaissent ». Les enfants à naître sont eux aussi concernés, et ce rapport considère la grossesse comme une période particulièrement exposée aux violences conjugales.

Si la place de l'éducation des enfants et des adolescents et de leur prise en charge doit être encore renforcée, il nous faut absolument augmenter le volet préventif de ce texte de loi. Si nous nous accordons naturellement, et heureusement, tous pour accentuer la répression à l'égard des auteurs de violences et faire cesser la tartufferie qui consistait à reléguer ces actes délictueux dans la sphère privée, nous ne pouvons que regretter la faiblesse des dispositions de prévention du texte.

Pour rendre efficace le traitement judiciaire des violences au sein du couple, la répression de ces actes doit être renforcée mais ne peut suffire. De nombreux amendements avaient tenté de réintroduire des mesures de prévention et d'accompagnement, mais ils ont été rejetés au motif qu'ils relevaient du réglementaire et non du législatif. Pourtant, nous aimerions voir figurer plus nettement dans cette proposition de loi la sensibilisation des médecins et des professionnels de santé afin de favoriser le dépistage des violences, ainsi que la formation initiale et continue des magistrats et des policiers, indispensable pour recueillir la parole des victimes et permettre aux femmes d'être protégées et prises en charge. La faiblesse de ce volet préventif risque de compromettre l'efficacité de certaines des mesures prévues.

Évoquant les personnes fragiles et fragilisées, comment oublier celles qui sont, de surcroît, fragilisées par leur condition eu égard à leur origine, à leur état-civil ou à leur appartenance ou non à la nation française, qu'elles résident de manière légale ou pas sur notre territoire ? À titre personnel, je pense que nous gagnerions, sur ce sujet aussi, à prendre mieux en considération le cas de ces femmes qui sont souvent victimes d'un faisceau de violences multiples.

J'aimerais aussi que notre débat puisse être replacé dans une problématique plus large de violences incluant les mariages forcés et les mutilations sexuelles, y compris pour les personnes majeures, ainsi que les formes dites modernes d'esclavage. Nous y reviendrons lors de l'examen de certains articles.

Je souhaiterais également, dans le sens de ce qu'a exprimé notre collègue Martine Billard en commission, que ce texte n'oublie pas la condition des enfants jetés au milieu de ces actes sordides et terrifiants. Notre assemblée s'est grandie cette semaine en adoptant le texte relatif à l'harmonisation des législations européennes applicables aux droits des femmes. Elle se grandirait plus encore en créant l'observatoire national spécifique que nous vous avons demandé, madame la ministre.

Pour finir, je voudrais saluer l'intelligence collective qui a prévalu, d'abord dans la mission d'évaluation de la politique de prévention et de lutte des violences faites aux femmes, puis dans cette commission spéciale, toutes deux présidées par Danielle Bousquet, avec Guy Geoffroy comme rapporteur. Les conclusions de ces deux instances sont à l'origine de ce texte, qui représente une avancée indéniable dans la prise en compte par notre société des violences faites aux femmes et signe heureusement la fin d'un tabou. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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