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Intervention de Guy Geoffroy

Réunion du 25 février 2010 à 15h00
Prévention et répression des violences faites aux femmes — Discussion d'une proposition de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuy Geoffroy, rapporteur de la commission spéciale chargée d'examiner la proposition de loi renforçant la protection des victimes et la prévention et la répression des violences faites aux femmes :

Je veux saluer également tous les collègues qui nous ont rejoints au sein de la commission spéciale créée avec l'accord des quatre présidents de groupe et du président de l'Assemblée nationale. Ils nous ont apporté un regard neuf, extérieur à nos réflexions, et nous ont permis de faire évoluer ce texte de façon positive lors de nos travaux, en particulier lors des auditions auxquelles vous avez bien volontiers participé, mesdames les ministres, avec toute l'efficacité que nous avons reconnue.

Au-delà de vous, mesdames les ministres, c'est tout le Gouvernement que je remercie, car nous étions très sensibles à ce qu'il penserait et ferait de nos travaux. Certains exprimaient une interrogation teintée d'inquiétude sur la tentation qui aurait pu être la sienne de nous laisser travailler puis de prendre l'initiative d'un projet de loi. Cela n'est pas ce qu'il a fait et c'est à son honneur. J'ai noté avec un très grand intérêt, le 25 novembre dernier, la déclaration du Premier ministre qui, résumant l'ensemble des paroles prononcées par tous les ministres en charge de ces questions, a annoncé que l'année 2010 serait consacrée à une grande cause nationale, celle de la lutte contre les violences faites aux femmes. Et, comme point d'appui essentiel à la politique à mettre en oeuvre, le Premier ministre a évoqué cette proposition de loi, qu'il a même suggéré au Parlement de voter avant l'été prochain. Nous sommes le 25 février ; le calendrier de nos ambitions est donc tenu. L'adoption de cette proposition de loi est tout à fait possible et il nous revient aujourd'hui de franchir cette première étape, suite aux travaux extrêmement porteurs de notre mission, puis de notre commission spéciale.

De quoi s'agit-il ? Il ne s'agit pas de régler, une fois pour toutes et par l'intermédiaire d'une seule loi, toutes les questions très complexes qui se mêlent, s'ajoutent les unes aux autres, et sont fondées sur autant de singularités qu'il y a de situations. Il s'agit d'apporter une pierre considérable à cet édifice que nous avions déjà, ici, de manière certes modeste mais déterminée, commencé à solidifier en 2006 lorsque nous avions, également à l'unanimité, adopté une proposition de loi dont j'avais eu l'honneur d'être rapporteur, et qui avait fixé des règles importantes servant toujours de base à celles que nous utilisons comme mécanismes et comme ressorts dans cette proposition de loi.

En 2006, nous avions pour objectif de lutter contre les violences au sein de tous les couples, mariés ou non – les concubins et les pacsés sont également concernés –, ainsi qu'à l'issue d'un couple. Sur ce dernier point, les drames récents montrent à quel point nous avons raison de considérer le problème dans toute son ampleur. De tels drames peuvent en effet se produire longtemps après la séparation du couple, en raison notamment de la problématique toujours douloureuse qui concerne les enfants.

Avec cette proposition de loi, nous avons voulu aller plus loin et franchir une étape décisive : mieux prévenir, mieux protéger, mieux réprimer quand il n'y a malheureusement pas d'autre solution.

Mieux prévenir, tel est l'objet des dispositions encore en suspens relatives à la formation de tous les personnels qui, à tous les niveaux, dans tous les ressorts de l'action publique, sont amenés à travailler à l'accueil et à l'accompagnement des femmes victimes de violences. Nous avions prévu un article pour instituer une véritable cohérence dans cette formation, afin que celle-ci soit coordonnée. Cette disposition étant tombée sous le coup de l'article 40 de la Constitution, elle n'a pu être étudiée par la commission spéciale et ne sera pas examinée en séance. Nous serons donc très attentifs, mesdames les ministres, à ce que vous nous en direz.

Prévenir, c'est aussi lutter contre tout ce qui, au sein des médias, peut concourir, directement ou indirectement, à entretenir cette très mauvaise manière qui consiste à créer de la discrimination à l'encontre des femmes et risque d'inciter la jeunesse à adopter des comportements qui reproduiront les douleurs et souffrances vécues par les femmes.

Il faut également protéger, et le premier article de la proposition de loi est symbolique à cet égard. L'ordonnance de protection issue du référé-protection que nous y prévoyons est lourde de sens, et nous espérons qu'elle permettra de prévenir des drames comme ceux que notre pays a récemment connus. Cette ordonnance de protection pourra être délivrée par le juge, celui-ci étant saisi par la femme victime de violences ou, avec l'accord de celle-ci, par le ministère public. Ce sera en quelque sorte une table d'orientation de toutes les actions civiles ou pénales nécessaires pour lutter contre ce fléau. Grâce à ce dispositif très diversifié, le magistrat pourra aider la femme à trouver des solutions provisoires sur le plan matériel, en matière de logement notamment, afin de lui laisser le temps nécessaire pour décider, avec plus de sérénité, de la suite à donner à cette première étape, que ce soit sur le plan civil ou sur le plan pénal.

Nous attendons un geste important de votre part, mesdames les ministres, à savoir la réintroduction de l'article visant à étendre le bénéfice de l'aide juridictionnelle aux femmes étrangères en situation irrégulière, afin que celles-ci ne se trouvent pas dans la pire situation, celle de vouloir s'en sortir mais de ne pas avoir la possibilité matérielle de le faire.

Par ailleurs, il faut réprimer en allant au-delà de ce que nous avions prévu en 2006. Réprimer, c'est faire que soient reconnues demain les violences de nature psychologique et morale exercées au sein du couple. Réprimer, c'est permettre que le recours à la médiation pénale ne soit plus ce qu'il est, de manière inégale mais réelle, dans certaines juridictions, et que la femme soit présumée ne pas accepter d'y recourir dès lors qu'elle aura sollicité la protection de la justice par l'ordonnance de protection.

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