Monsieur le président, madame la secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité, si l'objectif d'harmoniser par le haut les législations européennes sur les droits des femmes a fait consensus depuis le début de nos discussions, ses modalités rédactionnelles ont fait débat.
Concrètement, le texte qui vous est soumis prévoit une étude comparative des mesures en vigueur en Europe pour éclairer le législateur. Il invite la présidence espagnole à proposer au niveau européen des directives sur la base des législations qu'elle jugerait les plus protectrices et le Gouvernement français à présenter ses projets dans les domaines qui demeurent de compétence nationale. Je salue celles et ceux qui, sur tous les bancs de la majorité, de l'opposition et du Gouvernement, ont permis jeudi dernier de lever les derniers malentendus et d'obtenir un compromis – probablement historique, j'ose le dire – puisque les amendements de chaque groupe ont tous été retenus à l'unanimité.
Ce texte constitue un premier pas vers une Europe où chaque citoyenne, qu'elle soit française, britannique, grecque ou lituanienne, pourrait se prévaloir des mêmes droits dans sa vie familiale, sexuelle, professionnelle et politique. C'est à ce grand projet, défendu avec passion et depuis trente ans par Gisèle Halimi, que notre assemblée est invitée à apporter son soutien solennel.
On m'a interrogée à plusieurs reprises sur les avancées qui pourraient bénéficier aux Françaises, si cette résolution était votée. Je pourrais en citer plusieurs : la législation néerlandaise en matière de congé parental implique davantage les pères dès la naissance dans l'éducation des enfants et la participation à la vie familiale ; la législation estonienne en matière d'autorité parentale et de statut du beau-parent offre un accompagnement légal à la recomposition des familles ; la loi belge sur la parité en politique va plus loin que la nôtre en s'appliquant notamment au gouvernement.
Nous ne portons pas cette proposition de résolution uniquement pour les Françaises, mais pour l'ensemble des Européennes, et je pense surtout aux citoyennes des nouveaux États membres qui doivent aujourd'hui pleinement bénéficier des progrès obtenus, notamment par les Françaises, en matière d'éducation sexuelle et reproductive, d'accès à la contraception, de lutte contre les discriminations dans l'emploi, contre le harcèlement moral et sexuel ou contre les viols.
Ce texte vise donc à envoyer un message fort : rejoindre l'Union européenne, c'est, bien sûr, adhérer à sa vision des Droits de l'Homme, mais aussi – car l'un et l'autre ne sont pas dissociables – à une conception exigeante de l'égalité et des droits des femmes.
La France, cela a été souligné sur l'ensemble de nos bancs, doit être l'un des moteurs de l'affirmation de ces droits. Après le vote du rapport Tarabella au Parlement européen, alors que va s'ouvrir à New York la conférence dite « Pékin+ 15 » sur le statut des femmes et alors que vont être présentées à Valence les initiatives de la présidence espagnole, le vote de cette résolution ne peut que renforcer la crédibilité de la France pour ce qui est de prendre toute sa part de ce mouvement. C'est d'abord un outil pour le Gouvernement qui abordera les négociations internationales avec le soutien de l'Assemblée nationale et la garantie que les engagements qui seront pris au niveau européen trouveront rapidement une concrétisation nationale. Mais c'est aussi pour chacune et chacun d'entre nous une exigence. Nous ne pourrons demain, lorsque viendra le temps des décisions concrètes, faire abstraction de cette volonté commune d'avancer dans le sens de l'égalité la plus élevée. C'est l'exigence de nous demander, à chaque fois que nous votons une loi sur des sujets aussi divers que les retraites, la santé ou les lois électorales, si nous faisons réellement progresser la cause des femmes, et de regarder quelles sont les meilleures réponses qui ont pu être apportées ailleurs en Europe.
C'est dans cet esprit que les socialistes, radicaux, citoyens et divers gauche voteront la proposition de résolution européenne qu'ils ont déposée. Ils vous invitent, mes chers collègues, à confirmer solennellement le vote unanime qui fut le vôtre, jeudi dernier, sur son article unique. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR et sur quelques bancs du groupe UMP.)