Mesdames et messieurs, chers collègues, nous ne pouvons commencer l'examen de ce rapport d'application de la LME sans en effet évoquer avec affection et tristesse le souvenir de Jean-Paul Charié qui a joué un rôle éminent pour la mise en oeuvre de la LME mais aussi au sein de la commission d'examen des pratiques commerciales (CEPC), où Catherine Vautrin l'a aujourd'hui remplacé, ou dans d'autres domaines, notamment celui de l'urbanisme commercial. Il a été un rapporteur courageux et infatigable, un fervent défenseur des PME, de l'économie de proximité et de l'artisanat, tout en démontrant qu'il était également un fin connaisseur des relations existant entre les secteurs de l'industrie, du commerce et de la grande distribution. C'était un homme politique de conviction et de dialogue qui oeuvrait sans cesse à rapprocher les points de vue. Je le remplace aujourd'hui mais, comme vous tous, je ne l'oublie naturellement pas.
Dans le cadre de mes fonctions de président de la commission des affaires économiques, j'ai été le premier à lancer la procédure de contrôle de l'application des lois : nous l'avons ainsi fait pour la première fois en janvier 2008 sur la mise en application de la loi du 5 janvier 2006 d'orientation agricole, Jean Gaubert ayant été à cette occasion co-rapporteur avec notre collègue Antoine Herth. Cette pratique, désormais inscrite dans le règlement de notre assemblée, vise à permettre aux parlementaires, après l'avoir votée, de vérifier que la loi a bien été appliquée tant dans son esprit que dans sa lettre. Un rapport d'exécution de la loi, ce n'est pas un rapport de plus mais un travail effectué en toute transparence et en toute indépendance par un député de la majorité et un député de l'opposition qui se traduit par de véritables investigations effectuées sur pièces et sur place. Je dois avouer que ce rapport a été fait sans concession.
Je laisserai dans un instant Jean Gaubert vous présenter en détail ce rapport mais je tiens à dire quelques mots sur trois sujets importants abordés dans ce document : les marges arrière, les délais de paiement et l'urbanisme commercial.
Sur les marges arrière, on a observé une réelle diminution qui s'échelonne entre 30 et 10 % : de ce point de vue, l'objectif de la loi a été atteint. Est-on pour autant allé jusqu'au bout ? Si on a mis un coup d'arrêt à une évolution qui était inacceptable, on peut néanmoins mieux faire. Sur les prix, les résultats sont très mitigés. Sur les pratiques commerciales, des abus persistent et doivent être dénoncés : on constate ainsi des pénalités abusives qui explosent, une renégociation des contrats à peine conclus… Un satisfecit doit néanmoins être adressé au Gouvernement : en effet, si neuf grandes enseignes ont été assignées devant les tribunaux à raison de leurs pratiques commerciales, c'est le résultat direct du vote de cette loi. Ces procédures montrent également qu'on est bien décidé à ne pas laisser les choses se faire et qu'on sera attentif à l'avenir.
Sur les délais de paiement, il existe là aussi incontestablement des progrès : on constate une baisse moyenne de onze jours des délais de paiement. Pour autant, il existe encore trop souvent des accords dérogatoires : je ne suis pas certain qu'il faille en accepter autant. On observe également un développement des pratiques abusives et de contournement de la loi (dépôt vente, pratique consistant à faire supporter le coût financier du stock au fournisseur…). Des constats ont été faits à ce sujet et on va réfléchir à la manière dont on peut les faire diminuer à l'avenir.
En revanche, sur l'urbanisme commercial, le bilan est beaucoup plus mitigé. Pendant la période transitoire, le bilan est incontestablement mauvais. Même si nous n'avons pas tous les éléments chiffrés et fiables sur les conséquences de la fameuse circulaire Martin que notre commission a fait rapporter dès qu'elle en a eu connaissance, le bilan n'est pas bon à l'évidence. Quant au nouveau régime, il est marqué par un certain empirisme et par des résultats incertains. C'est la raison pour laquelle notre commission a décidé d'avancer. En effet, le Gouvernement s'était engagé auprès de nous pour intégrer l'urbanisme commercial dans le code de l'urbanisme dans les six mois suivant le vote de la loi. Or, aujourd'hui, on n'a toujours pas de réponse de sa part alors même que le délai de six mois est largement dépassé. Notre commission a donc décidé de travailler sur ce sujet afin que l'urbanisme commercial soit un sujet traité et réglé avant l'été : nous allons mener une réflexion qui se traduira par une proposition de loi de la commission qui sera prochainement déposée.