Non, monsieur le ministre. On peut pousser la dialectique jusque très tard dans la nuit, mais cela n'a aucun intérêt. Nous sommes plusieurs à avoir quelque expérience de la chose judiciaire : nous savons que des relaxes sont prononcées tous les jours. Or, si une personne relaxée réclame des dommages et intérêts pour la saisie et la vente de ses biens suite à une injonction du préfet, cela risque aussi de coûter cher ! Vous vous placez bien sûr dans l'hypothèse d'une condamnation ; en ce cas, en effet, la procédure n'est guère gênante. Sauf que le préfet ne dispose d'aucun élément susceptible de lui faire apprécier le bien-fondé de l'imputation, donc l'issue probable du procès.
Le point critiquable est donc le rôle confié au préfet. Si ce rôle était dévolu au procureur ou à toute autre autorité judiciaire capable, par son accès au dossier, de décider en connaissance de cause, on pourrait dire : passe encore. Mais, je le répète, ce n'est pas le cas du préfet.
En réalité, vous essayez de régler des problèmes d'intendance : les stocks s'accumulent, et il se passe parfois des choses avec les scellés. Il faut y remédier, mais cela ne justifie en rien une mesure qui n'est pas indifférente au regard de la présomption d'innocence.
Bref, nous ne vous demandons pas de restituer son véhicule à une personne qui s'est rendue coupable de faits graves, mais la situation est parfois bien différente. Ce qui nous choque, c'est l'initiative confiée au préfet, lequel ne connaît le dossier que par l'intermédiaire de la police : il n'a donc aucun moyen de juger s'il est probable ou non que les biens seront confisqués. Je ne veux pas que M. le ministre laisse entendre que nous nous opposons à la confiscation et à la vente des biens au profit de l'État et des victimes.