À la question de savoir s'il y a lieu de délibérer sur ce texte, je répondrai très simplement, monsieur Blisko : oui, nous allons bien sûr délibérer sur notre texte.
Vous qui êtes psychiatre de formation, vous ne nous ferez pas croire que vous ne comprenez pas le concept de dangerosité, qui nous intéresse ici. Vous confondez, à mon avis intentionnellement, la dangerosité criminologique, qui relève du champ pénal, et la dangerosité psychiatrique, qui n'en relève pas.
Comment pouvez-vous dire que vous êtes incapable de définir cette dangerosité criminologique après avoir entendu les professionnels que nous avons auditionnés en commission ? Je vous renvoie aux termes de mon rapport : « la dangerosité criminologique, à l'inverse de la dangerosité psychiatrique, se situe dans le champ pénal : c'est le risque qu'un individu commette une infraction. Dans son acception criminologique, la dangerosité peut se définir comme “ un phénomène psychosocial caractérisé par les indices révélateurs de la grande probabilité de commettre une infraction contre les personnes ou les biens. ” » Il existe donc bien une définition de la dangerosité.
En toute bonne foi, vous ne pouvez pas soutenir que notre société, les experts, les spécialistes aujourd'hui à la disposition des magistrats, sont incapables de définir la dangerosité d'un individu. On se demande dans ce cas comment les juges de l'application des peines peuvent décider des libérations conditionnelles : cela ne vous pose pas de problème qu'on motive des décisions de libération conditionnelle par l'absence de dangerosité, alors que cela vous en pose qu'on puisse décider un placement en rétention pour cause de dangerosité. Il y a là deux poids, deux mesures !
Voilà pourquoi je crois que votre confusion est intentionnelle. Il ne s'agit ni de science-fiction, ni de psychiatrisation de la justice : le malade psychiatrique échappe à la justice pénale et entre dans un autre champ, celui de l'univers médical et du traitement de l'irresponsabilité pénale, auquel, madame la garde des sceaux, est consacré le deuxième volet de votre projet de loi.
Je reconnais avec vous qu'il y a des efforts à faire pour mettre fin à la misère psychiatrique, notamment en matière de postes budgétaires. Mais dois-je vous rappeler que c'est notre majorité qui, grâce au « Programme 13 000 », augmente le nombre des places de détention ?