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Intervention de Serge Blisko

Réunion du 8 janvier 2008 à 15h00
Rétention de sûreté et déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental — Question préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Blisko :

Avec cette mascarade judiciaire, vous sacrifiez la liberté individuelle sur l'autel du principe de précaution. Le dispositif de rétention de sûreté n'est censé concerner que des individus ayant commis des infractions très particulières. En cela, nous avons en quelque sorte affaire à une juridiction d'exception destinée à certains types de criminels. Mais, comme vous l'avez fait ce matin, vous ne pourrez qu'élargir le champ d'application de la loi, au gré des faits divers et des mouvements d'indignation publique. Vous avez mis le doigt dans un engrenage que vous ne contrôlerez plus.

Nos collègues de la majorité nous préparent un monde effrayant comme celui que décrit le film de Spielberg, Minority report, que je vous invite à voir, en DVD, car il ne passe plus en salle. Il met en scène une unité spéciale de la police de New York, qui s'est donné pour mission d'arrêter les futurs criminels avant même qu'ils ne commettent leurs forfaits. De la réalité à la fiction, il n'y a souvent qu'un pas, et le vote de ce projet de loi pourrait nous le faire franchir.

Dans ce film, les investigations de la police précriminelle de New York reposent sur la consultation de « precops », sortes de cerveaux surdoués, censés prédire l'avenir. Dans votre projet de loi, j'ai cru comprendre que le rôle de « precop » serait confié aux experts, aux psychiatres en particulier, qui devront apprécier la dangerosité. Je doute qu'ils souhaitent être les acteurs de ce mauvais film.

De plus, de l'aveu de tous, le concept de dangerosité est très flou. La définition criminologique de la dangerosité, qui se décline essentiellement en termes psycho-sociaux, diffère totalement, vous le dites vous-même, monsieur Garraud, de sa définition psychiatrique, axée sur la détection de troubles mentaux. Les critères d'évaluation se sont affinés au cours des dernières années. Les facteurs dits exposants, favorisant le passage à l'acte, sont mieux connus. C'est sur ces questions qu'il faut travailler. Inspirons-nous de travaux bien faits dans d'autre pays, comme au Québec, plutôt que d'inventer ce genre de construction monstrueuse – je reprends un terme qui a été employé.

Jamais on n'a dit que les facteurs exposants pouvaient permettre d'avoir une sorte de vision prédictive. Il est très délicat de savoir pourquoi tel individu passe à l'acte et tel autre non. Vous avez une solution simple, c'est de mettre tout le monde au trou, et personne ne passera plus à l'acte.

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