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Intervention de Lionel Tardy

Réunion du 11 février 2010 à 9h30
Projet de loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure — Article 4

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLionel Tardy :

Avant de parler du juge, qui sera l'objet d'un amendement spécifique, j'aimerais revenir sur les notions de filtrage et de blocage. Je défendrai à ce propos un amendement n° 259 . Il faut appliquer les dispositions de la LCEN, c'est-à-dire agir d'abord au niveau de l'éditeur et de l'hébergeur.

Les notions de filtrage, que nous avons longuement évoquées dans la loi HADOPI, vont éclairer nos débats sur l'article 4. La Fédération française des télécoms a adressé une étude d'impact sur le filtrage des contenus pédophiles souhaité par le Gouvernement. L'étude conclut que le filtrage est au mieux inefficace, au pire extrêmement coûteux, pour une efficacité de toute façon douteuse – c'est la Fédération française des télécoms qui le dit. « Plus la technique de blocage est précise – indique cette étude –, plus elle est coûteuse et plus elle présente un risque de congestion au niveau de l'équipement d'inspection – les DPI – qui se matérialise le jour où un site à fort trafic – Google, YouTube, par exemple – est inséré dans la liste des sites à bloquer ».

La Fédération française des télécoms estime que le coût du filtrage peut monter jusqu'à 140 millions d'euros – qui paie ? – pour une technique très invasive d'inspection profonde des paquets – le DPI – qui consiste à examiner chacune des communications des internautes pour vérifier la licéité du contenu.

Selon les opérateurs, « les solutions de blocage (...) ne permettent d'empêcher que les accès involontaires à des contenus pédopornographiques disponibles sur le web à travers le protocole http », mais pas d'empêcher les réseaux pédophiles de prospérer. « Il est à souligner, poursuivent-ils, que tous les contenus diffusés sur les réseaux Peer-2-Peer, Usenet, chat de type IRC, ne sont pas inscrits dans le périmètre de blocage. Or d'après une enquête (...), IRC est depuis vingt ans une des principales plateformes d'échange d'images pédopornographiques ».

Comme tout filtrage, celui imposé par le Gouvernement et mis en oeuvre par les FAI posera des problèmes collatéraux. Soit le filtrage est trop grossier et présente un risque de surblocage – par exemple, si l'on bloque l'adresse IP de tout un serveur pour bloquer une seule page, comme l'a dit Martine Billard –, soit le filtrage veut être le plus précis possible et devient alors impossible à mettre en oeuvre techniquement pour des coûts raisonnables. De plus, toutes les techniques de blocage, même les plus efficaces, peuvent être contournées par l'installation de sites miroirs, par changements réguliers d'adresse IP, par proxys, par réseaux anonymisants de type TOR, par l'utilisation de DNS tiers ou encore par des contournements de type fast-flux. Qu'il s'agisse ou non de HADOPI, le problème reste le même.

Pour conclure, il y a fort à parier que, dès que le blocage sera effectif, les sites spécialisés dans les techniques de contournement vont se multiplier, réduisant ainsi fortement l'efficacité du dispositif. C'est ce que prédit la Fédération française des télécoms.

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