Sur la montée de la violence et des outils mis en oeuvre ces dernières années pour l'enrayer, le constat est le même : échec et impuissance.
Lorsque je parle de violence, je pense aussi aux policiers qui sont sur le terrain, dans nos quartiers. Le texte que vous proposez, monsieur le ministre, ne leur rendra pas la vie plus facile. Je regrette que vous vous intéressiez si peu aux résultats concrets. Ne serait-on pas en droit d'attendre que le patron de cette belle administration de la police nationale regroupée aujourd'hui avec la gendarmerie leur donne les moyens d'agir et de mieux faire leur travail ? Or les dispositions contenues dans ce texte rendront le travail des policiers encore plus difficile parce que vous ne leur accordez aucun moyen supplémentaire. Avec cette série de nouveaux articles, ils ne manqueront pas de se poser la question de savoir comment les appliquer, ce qu'ils n'ont cessé, du reste, de faire ces dernières années compte tenu du nombre de lois nouvelles qui ont été votées. Comment peuvent-ils répondre à cette frénésie législative ? Comment être efficace dans ces conditions ? Voilà les questions qu'ils se posent, car les policiers, eux, recherchent toujours l'efficacité dans des circonstances pourtant particulièrement difficiles.
J'ai, pour ma part, une pensée pour ces 27 % de policiers qui ont, ces dernières années, subi des violences physiques. On leur demande d'être en première ligne : ils sont en première ligne. On leur demande d'aller là où beaucoup de services publics ne vont plus, excepté les services publics municipaux : ils y vont en dépit de conditions très dures. En tant qu'élus, il nous arrive d'être présents dans des commissariats à des heures avancées de la nuit. Lorsqu'ils répondent à un appel au numéro de police-secours dans un quartier en difficulté, ils partent à trois, monsieur le ministre, et non à quatre : ils ne le pourraient tout simplement pas Lorsque je les vois partir dans la nuit, moment particulièrement criminogène, angoissant pour des policiers qui, bien souvent, sont jeunes, occupent leur premier poste et sont au moins aussi tendus que ceux qu'ils retrouvent sur le terrain, je ne peux m'empêcher de penser que vous ne les mettez pas en situation de faire un travail efficace. Il n'est pas étonnant que les saisines de la Commission nationale de déontologie portent le plus souvent sur des faits qui se produisent la nuit dans les endroits où la délinquance est importante, des endroits où sont affectés de jeunes policiers. Les forces de police sont dans une situation dramatique : ils sont isolés et sans moyens dans des endroits qui concentrent le plus d'insécurité.
J'aurais aimé pouvoir m'entretenir avec vous, monsieur le ministre, de la finalité de l'emploi des forces de police, de la doctrine que nous devons mettre en place, sans cesse bouleversée par les textes que vous nous faites voter.
Quel peut être l'indicateur de réussite de votre action, monsieur le ministre ? Avec ce texte, vous abandonnez les terrains les plus difficiles, là où la délinquance est la plus endurcie et où sévit l'économie souterraine. Lorsque l'on parle de la Seine-Saint-Denis ou de l'Essonne – Manuel Valls connaît bien ces problémes – vous ne pouvez vous contenter de nous opposer des chiffres : une augmentation en valeur absolue des effectifs de police. On pourrait discuter pendant des heures pour savoir s'il y a 600 policiers supplémentaires ici ou là. Moi je raisonne autrement. Je vous pose une question simple, monsieur le ministre, que je pose depuis quelques années : êtes-vous prêt à mettre en place une mission pluraliste pour réfléchir à la répartition des effectifs de police et de gendarmerie sur l'ensemble du territoire. Je ne vous demande pas de nous dire qu'en Seine-Saint-Denis, il y a tant de policiers supplémentaires. Je veux savoir si la répartition des effectifs de police correspond à la réalité de la carte de l'insécurité dans notre pays.