Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, s'il ne fallait retenir qu'un premier chiffre dans l'océan des statistiques qui caractérisent l'évolution de la délinquance entre 2002 et 2009, je retiendrais et vous livrerais celui de 32,6 %, c'est-à-dire le pourcentage d'augmentation des violences exercées à l'encontre des dépositaires de l'autorité, policiers, gendarmes, enseignants, dont on a beaucoup parlé ces derniers jours et qui mériteraient plus de respect de la part du ministre de l'éducation nationale, et agents des transports en commun. Plus grave encore, la société se fait partout plus dure ; M. Bénisti vient de le dire. L'ensemble des violences faites aux personnes ont progressé de 14 %, soit 54 493 délits supplémentaires. Quant aux violences physiques gratuites, qui n'ont pas toujours le vol pour mobile, elles explosent, comme l'a rappelé Delphine Batho, avec une progression de près de 50 %.
Voilà des chiffres qui signent un bilan.
Cette hausse de la délinquance est confirmée par l'enquête dite « de victimation » conduite en 2009 par l'INSEE, qui estime à près de 850 000 le nombre de victimes de violences physiques hors ménage et hors vol en 2008, contre 736 000 en 2006, soit une croissance de 11,5 %. Ces enquêtes, menées, tout d'abord, par la région Île-de-France, montrent, encore mieux que les pourcentages précédents, l'étendue de la violence. Ces actes, nous le savons tous, sont commis par des individus toujours plus jeunes, toujours plus violents.
Si l'on peut se réjouir que les atteintes aux biens chutent de 22 % sur la même période – vous ne cessez de nous rappeler ce chiffre –, les spécialistes s'accordent à reconnaître, on le sait, que cela est dû, en grande partie, au travail des industriels, qui rendent toujours plus inviolables leurs produits, comme les véhicules et les téléphones mobiles.
Échec de la police, de la gendarmerie, des forces de l'ordre, monsieur le ministre ? Non. Échec de l'orientation politique donnée à nos forces de l'ordre ? Oui, totalement. Votre politique du chiffre est ainsi clairement invalidée.
Malheureusement, la LOPPSI est imprégnée de la même logique. Certes, elle comporte évidemment des éléments intéressants, dont nous discuterons à l'occasion de l'examen des articles et des amendements, mais c'est la logique qui compte.
Je ne m'en réjouis pas, et il faut rester modeste face à ce qui est un échec. La société française s'installe dans une violence de plus en plus gratuite et de plus en plus précoce, une violence qui frappe chaque jour un peu plus nos concitoyens, parmi les plus modestes et les plus fragiles.
Face à ce constat, j'aurais aimé, monsieur le ministre, que l'on sorte des clichés, si faciles, qui ne trompent personne. Or vous avez cru bon, à quelques semaines des élections régionales, de rejouer la même sérénade avec votre majorité. M. Ciotti en est le spécialiste, qui nous rappelle sans cesse les chiffres de la période 1997-2002. Peut-être savons-nous, monsieur Ciotti, pourquoi nous avons perdu les élections en 2002, mais je voudrais vous rappeler que cela remonte à huit ans et que c'est sur votre seul bilan que les Français vous jugent aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
En 2002, vous avez raison, M. Nicolas Sarkozy a su s'emparer de la question sécuritaire, mais pour ne finalement la traiter que superficiellement. Il a mis en place un traitement réactif, se focalisant sur le symptôme, non sur la cause. Sa méthode, fondée, avec un certain succès, sur la gestion à chaud des dossiers et les effets médiatiques, a entraîné une inflation législative sans précédent. En moins de huit ans, dix-sept lois ont été adoptées en cette matière, et vous continuez, avec les mêmes discours et les mêmes méthodes, reprenant par exemple votre idée d'un couvre-feu pour les mineurs de moins de treize ans.
J'en suis désolé, monsieur le ministre, cela ne marche pas ! La délinquance de tous les jours, les cambriolages, les agressions, les phénomènes de bandes, la prolifération des armes, la dérive d'un certain nombre de mineurs, des comportements parfois barbares, les agressions à l'école sont les éléments particulièrement inquiétants d'une dérive générale qui ne peut, évidemment, être ignorée. Face aux mêmes chiffres, face aux mêmes faits, quels discours, quelles questions auraient été les vôtres si vous aviez été dans l'opposition ?