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Intervention de Gilles Crémillieux

Réunion du 3 février 2010 à 16h15
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Gilles Crémillieux, président du syndicat Les locales TV :

Notre syndicat regroupe une vingtaine de télévisions locales, dont la quasi-totalité de celles qui desservent les métropoles et les grandes villes. Mon analyse sera donc parfois divergente mais toujours complémentaire de celle de M. Gérard Baumel. Je préside aussi le GIE TLA-Publicité, chargé de gérer les recettes publicitaires nationales des télévisions locales, et j'anime au sein de la presse régionale le groupement Télévision Presse Régions, qui regroupe des quotidiens régionaux impliqués dans la télévision locale.

Nous sommes heureux d'être reçus par vous aujourd'hui, car, en dépit de neuf réunions l'an dernier avec la direction du développement des médias (DDM) et de la nécessité de prendre des mesures urgentes, nous avons le sentiment de ne pas avoir été entendus.

L'histoire de la télévision locale en France est une succession de rendez-vous manqués. Elle est née en 1987, portée par la Générale des Eaux à Lyon et à Toulouse. À l'époque, les réticences étaient nombreuses, notamment celles de FR3 et de la presse quotidienne régionale (PQR). Dix ans plus tard, seules quelques télévisions locales avaient vu le jour – on se souvient de TV Périgord ou de la première époque de TV8 Mont-Blanc –, certaines rencontrant de grandes difficultés. En 1997, une étude IPSOS convainc la PQR de renoncer à la proposition de M6 de l'associer à des décrochages locaux et de tenter la voie de la télévision « de plein exercice ». En 1999, se crée, à l'initiative de Jean-Pierre Caillard, le GIE Télévision Presse Régions, regroupant 19 titres de la PQR favorables à une action dans la télévision locale.

Après avoir suspendu tous les appels à candidature, ce qui lui a valu les reproches du Conseil d'État, le CSA en a finalement lancés quelques-uns en 1998. Quatre télévisions seulement – à Lyon, Toulouse, Clermont-Ferrand et Marseille – ont été proposées aux annonceurs nationaux. Comment, dans ces conditions, le groupe Lagardère, qui a sans doute déployé beaucoup d'énergie, aurait-il pu rencontrer un quelconque succès ? Quand on propose une offre nationale, il faut non seulement une image nationale, mais aussi une couverture nationale. Les appels à candidature ont de nouveau été suspendus pendant 3 ans, pour mettre en place la TNT. En 2005, celle-ci a été lancée… mais les télévisions locales ont été oubliées. Un an plus tard, on a enfin trouvé un montage, que Jean-Luc Nelle décrira tout à l'heure. Il n'en demeure pas moins que les télévisions locales sont arrivées sur le numérique terrestre en retard, au compte-gouttes, en ordre dispersé, malgré les efforts du CSA pour instruire les dossiers le plus rapidement possible, et alors que le marché publicitaire avait commencé à se développer.

Toutes ces ruptures historiques ont fait qu'à la différence des radios locales qui ont connu une explosion dans les années 1980, les télévisions locales n'ont jamais eu un effet de masse.

Aujourd'hui, les télévisions locales se heurtent avant tout à des difficultés économiques. Certaines ont commencé avec un modèle trop ambitieux, trop proche de celui du service public, comme la télévision locale de Marseille qui comptait 50 salariés. Celle de Clermont-Ferrand, qui a débuté avec une trentaine de personnes, compte aujourd'hui 12 salariés dont 6 journalistes, 5 techniciens et un permanent ; avec 1,2 million d'euros par an, elle remplit son cahier des charges.

S'agissant des recettes, nous sommes favorables à leur mixité. En tant qu'éditeurs privés, nous devons d'abord mobiliser des ressources publicitaires locales, de l'ordre de 400 000 à 600 000 euros par an dans les villes moyennes – et jusqu'à 2 millions dans une grande ville comme Lyon – et des recettes de publicité nationale, gérées par un GIE et exigeant des programmes repérables par les annonceurs, tels que les informations, la météo ou les informations sportives. Nous avons d'abord eu une expérience avec TLR, régie qui a fonctionné jusqu'en 2006-2007 et qui, au bout de trois ans, générait 1,8 million d'euros de recettes ; puis des divergences nous ont obligés à mettre en place un autre système. Nous avons créé le GIE et nous sommes adressés à TF1 Publicité, qui, en juin dernier, a fait jouer sa clause de sortie. Des discussions ont ensuite été engagées avec la régie publicitaire de France Télévisions, mais celle-ci a renoncé ce matin même. Nous nous retrouvons donc seuls et cherchons à mettre en place une nouvelle organisation.

Pour une télévision locale comme celle de Clermont-Ferrand, dont le budget est de 1,2 million d'euros, les recettes de publicité nationale s'élèvent entre 50 000 et 60 000 euros, ce qui est peu.

Les collectivités locales ont donc un rôle d'accompagnement à jouer pour favoriser l'émergence de ce média que constituent les télévisions locales car elles sont les premières intéressées à son développement : nos télévisions ne sont pas des télévisions de service public mais des télévisions au service du public, au travers de la couverture de l'actualité locale, des chroniques citoyennes, du reflet de la vie associative…

C'est à ce titre que nous pouvons revendiquer un soutien plus actif de la part des pouvoirs publics, dont nous attendons le règlement du problème, devenu insoutenable, de la diffusion et de son coût ; de nouveaux accompagnements financiers, tels que l'éligibilité des télévisions locales au fonds de modernisation des entreprises de presse ou l'octroi de prêts à taux zéro pour des investissements techniques.

De notre côté, nous devons accroître nos audiences, grâce à trois niveaux de contenu : d'abord, la proximité ; ensuite, une prise en compte de l'élément régional, des télévisions locales voisines pouvant travailler ensemble sur certaines émissions – Bordeaux et Bayonne, Orléans et Tours, Montpellier, Nîmes et Perpignan – et ainsi générer des économies d'échelle ; enfin, le développement des achats collectifs de programmes nationaux pour certaines heures de la journée – notre audience est déjà significative entre 18 et 20 heures puisqu'elle atteint 1,5 % de parts de marché, contre 0,4 à 0,7 en moyenne sur la journée.

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