En troisième lieu, nous avons refusé trois formes de modulation faciles.
La première aurait consisté à réduire le nombre d'usages pris en compte – la réglementation actuelle en retient cinq : le chauffage, l'eau chaude sanitaire, l'éclairage, la ventilation et la climatisation. En mettant temporairement de côté l'éclairage et la ventilation, on pouvait certes desserrer la contrainte à hauteur de 10 kilowattheures environ. Cependant, le sens de l'histoire va plutôt vers la prise en compte d'un plus grand nombre d'usages, car une isolation plus forte accroît les phénomènes d'interdépendance entre les usages. L'énergie de cuisson, par exemple, qui n'est pas comptée, contribue au chauffage ambiant. L'un de nos interlocuteurs, M. Denis Clodic, directeur adjoint du Centre énergétique de l'École des mines de Paris, a ainsi indiqué que, dans une Passivhaus allemande, il suffit, en rentrant de week-end, d'organiser une fondue avec des amis pour réchauffer la maison. En outre, la directive 200291CE du 16 décembre 2002 sur la performance énergétique des bâtiments, qui reste la référence en la matière dans l'attente de celle qui est actuellement en discussion au Parlement européen, est très claire sur la liste des usages à prendre en compte.
La deuxième facilité que nous avons écartée est celle qui aurait consisté à anticiper trop vite sur la maison à énergie positive, en admettant que la norme des 50 kilowattheures s'applique en soustrayant du bilan des consommations énergétiques l'électricité produite par des panneaux photovoltaïques et revendue au réseau. À ce compte-là, une épave thermique couverte de capteurs photovoltaïques pourrait respecter la réglementation, ce qui n'est pas souhaitable. La performance énergétique du bâtiment est une chose, la promotion de l'énergie photovoltaïque en est une autre. Tel est bien le sens de notre rapport, quoi que puissent en dire certaines associations qui ont voulu en faire une interprétation inverse pour le démonter.
Seules doivent être prises en compte les énergies consommées sur place, ce qui n'exclut pas la part d'électricité photovoltaïque qui servirait à alimenter directement des équipements du bâtiment. Quant à la maison à énergie positive, elle devra d'abord être bien isolée pour consommer moins de 50 kilowattheures en énergie primaire, comme les autres.
La troisième facilité à laquelle nous ne nous rallions pas est celle d'une modification du coefficient de conversion de l'électricité. Notre position tient à la fois au respect des réalités de la physique et au souci de ne pas supprimer une incitation au progrès technologique.
Le premier argument renvoie au lien déjà évoqué entre le coefficient de conversion en énergie primaire, et les lois de la thermodynamique, en particulier le cycle de Carnot. L'électricité des centrales thermiques est produite par une machine à vapeur qui dissipe les deux tiers de l'énergie sous forme de chaleur. Tous les pays d'Europe retiennent un coefficient de conversion compris entre 2 et 3, et la France a fixé pour ce chiffre, par l'article 35 de l'arrêté du 24 mai 2006, la valeur de 2,58 en se calant sur l'analyse du rendement réel des centrales thermiques au début des années 1990.
Le second argument prend en compte les inconvénients d'une manipulation de ce coefficient pour l'innovation technologique. La norme des 50 kilowattheures pousse au développement d'une recherche active sur les pompes à chaleur : il faut consolider leur fonctionnement lorsque la source froide atteint des basses températures de moins de 10 °C, régler les problèmes de circulation d'eau pour les chauffe-eau thermodynamiques destinés aux logements collectifs, mettre au point des régulateurs de vitesse qui permettent de les faire fonctionner à différents régimes et prévoir la manière de les combiner avec d'autres systèmes ou d'autres énergies. Toutes ces pistes technologiques sont des chances à saisir afin de développer des produits pour lesquels s'ouvrent des perspectives de marché à l'exportation.
L'OPECST veut faire passer le message que la résolution des problèmes s'opère en allant de l'avant, en faisant de la recherche pour surmonter les obstacles technologiques. Il serait déraisonnable d'accorder un sursis quelconque, qui en appellerait un autre, puis un autre encore, jusqu'à ce que des industriels venus d'ailleurs s'emparent des marchés, en France et dans le monde, et des emplois correspondants.
Un seul cap : la recherche, le développement industriel, la conquête de marchés par la qualité des produits.