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Intervention de Francis Szpiner

Réunion du 3 février 2010 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la république

Francis Szpiner, avocat au barreau de Paris :

Je n'avais pas l'intention d'évoquer le procès de Youssouf Fofana, mais, puisqu'il vient d'en être question, je vais le faire.

Dans cette affaire, nous parlons de criminels et non de délinquants, de majeurs qui étaient mineurs au moment des faits, et non de mineurs. Il faut également revenir sur la nature de ce crime : Ilan Halimi est mort du silence. Il est effrayant de constater dans cette affaire que des dizaines de personnes connaissaient les circonstances de la séquestration d'Ilan Halimi, sans qu'aucune information ne soit portée à la connaissance des services de police. C'est le silence qui a tué Ilan et la justice a prolongé cette conspiration du silence avec la tenue du procès à huis clos : la société française ne sait pas pourquoi et comment un tel crime a pu être commis.

Moi, comme la famille d'Ilan, nous n'avons pas peur de la publicité des débats devant la cour d'assises des mineurs. Ce n'est pas la justice qui offre une tribune à Youssouf Fofana, mais c'est la société qui se regarde telle qu'elle est et telle qu'elle est composée.

Il va de soi que la publicité restreinte des débats devant les cours d'assises pour mineurs n'a qu'un seul fondement : permettre à celui, qui a commis un crime alors qu'il était mineur au moment des faits, de bénéficier d'un droit à l'oubli et de faciliter sa reconstruction.

Or, la publicité restreinte des débats s'accompagne d'une forme d'hypocrisie dans le cas du « procès Fofana » : l'identité des mineurs ainsi que leurs photos ont été publiées dans la presse, sans que, ni les avocats des parties, ni le ministère public, n'aient procédé aux moindres poursuites.

La question que je me pose est donc la suivante : l'accusé majeur, ancien mineur au moment des faits, est-il le seul juge de la manière dont doit être rendue la justice ? Dans ce procès, des accusés, majeurs au moment des faits, n'ont pas eu droit à un procès public. Seuls les accusés mineurs au moment des faits ont eu le choix du régime de publicité des débats. C'est pourquoi il ne me semble pas scandaleux que ce privilège, aujourd'hui réservé aux seuls accusés mineurs au moment des faits, soit transféré aux magistrats. Avec la présente proposition de loi, le magistrat, sur demande de l'accusé demandant à bénéficier d'une publicité restreinte, pourra apprécier les circonstances, afin de faire droit ou non à cette demande. Il ne s'agit pas là d'une atteinte intolérable aux droits d'une des parties au procès, puisqu'elle se fait sous le contrôle des juges. J'ai confiance dans les juges et, notamment, dans leur capacité à discerner l'intérêt général et les intérêts particuliers.

Mais il convient dans le même temps de renforcer la protection des mineurs et, en particulier, la répression contre la publication de l'identité et des photos de jeunes mineurs ayant commis un crime. Sur cet aspect, la loi doit être plus claire et plus répressive.

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