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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 3 avril 2008 à 9h30
Fonctionnement des assemblées parlementaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

Les mouvements sectaires exploitent à leur profit les vides de notre société, l'absence de lisibilité, l'effondrement des grands systèmes idéologiques, la peur de l'avenir, la difficulté de comprendre ce qui nous arrive individuellement et collectivement. Ces groupes menacent l'ordre public lorsqu'ils se radicalisent et, au-delà, loin des médias, au quotidien, combien comptons-nous de personnes abusées et spoliées, de couples brisés, de parents accablés, de vies mises en danger ?

À cet activisme s'ajoute l'activisme procédurier déployé par certains mouvements, souvent les plus importants et – cela va de pair – les plus riches, tels que la scientologie ou les témoins de Jéhovah. J'ajoute, toujours pour votre information, monsieur le secrétaire d'État, que les témoins de Jéhovah, à ma connaissance, n'ont pas acquitté leur dette au Trésor public – l'une des caractéristiques de ces groupements est en effet le viol de nos lois.

Là encore, ces organisations agissent en exploitant les failles de notre système juridique. Elles agissent en assaillant de procès les ex-adeptes qui osent témoigner publiquement, ou encore en harcelant juridiquement tout journaliste ou tout parlementaire susceptible de mettre à jour la dangerosité des activités déployées par ces organisations. Ainsi, comme le constatent les associations de défense des victimes de sectes, les ex-adeptes ne peuvent que trop rarement trouver argent et force psychologique pour entamer de longues et coûteuses procédures judiciaires face à des groupes ou associations armés pour une guerre financière et psychologique à outrance.

Cette réalité n'est malheureusement pas nouvelle. Ainsi, dès 1997, l'Observatoire interministériel sur les sectes, dans son rapport annuel, constatait l'utilisation pléthorique des procédures administratives et judiciaires :

« Au cours des deux dernières années, les associations répertoriées comme ayant un caractère sectaire dans le dernier rapport parlementaire, ont multiplié les actions judiciaires à l'encontre des personnes, élus ou spécialistes, et des associations engagées dans la lutte contre les dérives sectaires, sur le fondement de la diffamation, de l'injure raciale ou religieuse ou encore de la discrimination.

« Sans pour autant renoncer à ce type de comportement, certaines de ces associations privilégient aujourd'hui la saisie des tribunaux administratifs, en vue de gagner une reconnaissance sociale et obtenir des avantages identiques à ceux consentis aux religions traditionnelles. La multiplication des requêtes devant les juridictions administratives visant notamment à obtenir la communication des dossiers constitués au ministère de l'intérieur et sollicités, dans un premier temps, par l'intermédiaire de la CNIL ou de la CADA, témoigne de cette préoccupation.

« Mais, c'est surtout une organisation en particulier qui, désireuse de convaincre de l'insertion de ses membres dans la société, s'attache le plus à créer une jurisprudence en sa faveur. Attaquant en justice les municipalités qui s'opposent à l'implantation de ses lieux de culte, cette association a également engagé plus de 400 procédures devant les juridictions administratives, afin de bénéficier des exemptions fiscales réservées aux seules associations cultuelles régies par le loi de 1905. Au-delà de l'enjeu financier non négligeable, il s'agit pour cette association d'essayer d'obtenir le statut d'association cultuelle. »

Dans ce contexte, la proposition de loi qui nous est soumise est un excellent rempart contre l'acharnement procédurier, qui finit par s'apparenter à une forme de harcèlement et qui porte atteinte à la libre parole devant les commissions d'enquête.

Il nous appartient, à nous législateurs, de prendre le temps, dans l'objectivité d'un examen serein et méticuleux de la situation, d'établir un véritable état des lieux des conséquences de l'influence des sectes sur leurs victimes et des moyens dont disposent les acteurs concernés pour combattre, prévenir mais aussi sanctionner ce type de dérives. Pour mener à bien ce travail, il importe que le législateur puisse entendre les témoins, les ex-adeptes ou encore les acteurs de la lutte contre les dérives sectaires, dans un environnement juridique sécurisant.

Avec la commission d'enquête sur l'affaire d'Outreau – cela a été rappelé tout à l'heure –, mais également grâce à l'excellence du travail mené par certains médias, et je pense particulièrement à La Chaîne Parlementaire,…

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