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Intervention de Jean-Luc Warsmann

Réunion du 3 avril 2008 à 9h30
Fonctionnement des assemblées parlementaires — Discussion d'une proposition de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Luc Warsmann, président et, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Par ailleurs, la notion restrictive de bonne foi applicable aux comptes rendus s'applique. Vous savez en effet qu'en matière de diffamation, il existe une présomption de mauvaise foi et que pour établir la bonne foi il faut prouver quatre critères cumulatifs : l'objectivité, la prudence, l'absence d'animosité personnelle et la légitimité du but. Par exemple, la reproduction par un journaliste d'une information même issue d'une dépêche d'agence de presse n'exonère pas sa responsabilité car les journalistes sont tenus de vérifier l'exactitude de ce qu'ils publient. De même, un reportage qui ne présenterait que la version des faits proposée à une commission d'enquête par un témoin de manière imprudente, voire mal intentionnée, pourrait être considéré comme tendancieux et la bonne foi ne pas être établie.

Mes chers collègues, autant j'ai eu l'occasion depuis le début de mon intervention de vous dire combien cette proposition de loi me semble de bon aloi au regard de l'évolution des dernières années, autant je me dois d'ajouter qu'elle exigera de chacun d'entre nous une rigueur accrue. En effet, si, en accordant aux témoins la protection d'une immunité relative, nous renforçons notre mode de travail, nous accroissons du même coup les risques d'instrumentalisation de nos commissions d'enquête, notamment par des témoins que nous avons convoqués et qui s'en serviraient comme d'une tribune qu'ils pourraient être tentés d'utiliser de manière malintentionnée en vue de régler des comptes.

Cela nécessitera le devoir – plus important encore – pour le président ou le rapporteur d'une commission d'enquête de ne pas laisser s'exprimer un témoin qui commencerait à porter des accusations sans l'interrompre, sans lui demander de se justifier, d'apporter des preuves de ce qu'il affirme.

Cela rappelle aussi à chacun des futurs membres des commissions d'enquête – a fortiori au président et au rapporteur –, que, même s'il existe de la part de l'opinion publique un fort appétit de transparence, le huis clos fait aussi partie du travail parlementaire. Il est par conséquent tout à fait légitime que des commissions d'enquête puissent décider d'entendre des témoins à huis clos, à savoir sans la presse, afin de ne pas prendre le risque d'une instrumentalisation des débats et afin de jouir d'une plus grande liberté d'échanges et de ton. Il est donc important de rappeler que le huis clos n'est pas exclu, même si la loi de 1991 a pris sur la question une position de principe.

Enfin, dernier point, chacun doit garder à l'esprit que nous disposons d'une arme : l'incrimination pour faux témoignage. Il ne faudra donc pas hésiter, à l'avenir, si une commission d'enquête venait à être instrumentalisée par un témoin voulant abuser de la protection relative que nous lui voterions ce matin, à saisir le parquet et à demander des poursuites en cas de faux témoignage.

Voilà le bilan du travail de la commission des lois sur cette heureuse proposition. Nous voulons, mes chers collègues, en vous appelant à la voter, à la fois maintenir la légitimité, la crédibilité et l'efficacité des commissions d'enquête. Nous souhaitons améliorer l'équilibre entre l'impératif de publicité et celui d'efficacité de ces commissions. La solution proposée par le président de l'Assemblée et modifiée par la commission des lois dans le sens que je viens d'indiquer garantit cet équilibre. (Applaudissements.)

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