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Intervention de Hervé Mariton

Réunion du 2 février 2010 à 21h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2010 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHervé Mariton :

Personne ne comprendrait ici que la taxation des bonus vienne se substituer à cet engagement que vous aviez pris à l'automne.

Certains échanges précédents m'inspirent la remarque suivante : si l'intervention directe de l'État en faveur des banques n'a pas coûté, nous ne devons pas pour autant sous-évaluer le coût de la crise. Or le système financier et son fonctionnement ont leur part de responsabilité dans le coût de la crise.

Il ne faut donc pas confondre le coût du soutien immédiat aux établissements financiers et le coût de la crise pour la France comme pour les autres nations, qui ont dû mobiliser des moyens afin de la résoudre.

Troisième point : fallait-il lancer le grand emprunt ? Dans cet hémicycle, on rappelle souvent la jolie phrase du baron Louis : « Faites-moi de bonne politique, et je vous ferai de bonnes finances. » Le grand emprunt serait-il l'actualisation du principe du baron Louis selon lequel la définition de la bonne politique engendre les bonnes finances ? On peut vous accorder ce crédit et faire cette hypothèse.

Cela étant, certaines interventions précédentes méritent qu'on s'y arrête un instant. J'ai notamment trouvé intéressante celle d'Henri Emmanuelli, qui a rappelé le flou qui affecte la définition technique de l'emprunt que vous nous proposez. Tel que défini dans le projet, le grand emprunt est en réalité une augmentation du déficit budgétaire et la mobilisation des moyens nécessaires pour le couvrir.

Et d'ailleurs, madame la ministre, monsieur le ministre, je reprendrai une question que j'avais posée en commission sans obtenir de réponse satisfaisante. Les 13 milliards d'euros remboursés par les banques ne proviennent pas initialement de moyens disponibles que l'État avait sous la main. Il a fallu les mobiliser, continuer à les mobiliser, donc les payer.

En vertu de la rigueur et du sérieux qui vous caractérisent, vous avez à coeur de gager les frais financiers correspondant à une partie du grand emprunt, ce que j'approuve. Mais je ne comprendrais pas que les frais financiers supportés pour ces 13 milliards d'euros ne fussent pas gagés aussi.

Peut-être y avait-il d'autres moyens que le recours à un grand emprunt ? Je ne suis pas sûr d'avoir tout à fait compris pourquoi on ne les avait pas choisis. On aurait pu imaginer, par exemple, une dotation d'actifs aux opérateurs. On aurait pu aussi prévoir pour ces opérateurs une accélération du processus de mise en oeuvre de partenariats public-privé, sachant que cela se terminera de cette manière pour bon nombre d'entre eux.

Quatrième point : la définition des dépenses d'avenir. Depuis que l'idée a été exprimée par le Président de la République, nous en avons demandé une définition rigoureuse. Qu'est-ce qu'une dépense d'avenir ? Une dépense dont la réalisation permet d'engendrer des fruits qui financent l'effort initialement consenti.

Sans doute, l'essentiel de vos propositions s'inscrit ou s'inscrira – quand on est dans la majorité, on fait confiance – dans cette définition.

Pourtant, madame la ministre, des inscriptions curieuses se trouvent dans votre projet. Bien qu'intelligentes quant à l'objectif poursuivi, elles me paraissent étrangères à la définition précise, rigoureuse, nécessaire des dépenses d'avenir.

Il en va ainsi des internats d'excellence qui figuraient déjà dans des annonces et des engagements antérieurs du Gouvernement, lequel n'avait peut-être pas alors les moyens de les réaliser. Dans ce cas, le grand emprunt représente davantage une béquille budgétaire que l'initiation d'un processus réellement nouveau.

Vive les internats d'excellence, qui sont une excellente politique ; mais que viennent-ils faire dans le cadre du grand emprunt si l'on garde une définition rigoureuse de la dépense d'avenir ? Il s'agit assurément d'une politique « d'avenir », mais pas au sens du grand emprunt, me semble-t-il.

Les dépenses d'avenir devront être constamment définies, avec des critères énoncés et mesurés dont, madame la ministre, monsieur le ministre, vous devrez rendre compte devant le Parlement. Pour l'instant, tout cela ne me paraît pas suffisamment précis.

Cinquième point : la distinction entre les dépenses consomptibles et les dépenses non consomptibles. D'une part, cette distinction n'est pas contraignante dans le texte qui nous est présenté. Vous affirmez avec beaucoup d'autorité la différence et la répartition entre les unes et les autres : qu'en est-il dans la loi que nous allons voter ?

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