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Intervention de Michel Bouvard

Réunion du 2 février 2010 à 21h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2010 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Bouvard :

Le montant de cet emprunt sera amplifié par un effet de levier qui, dans différents secteurs, va jouer et permettre de lever des fonds supplémentaires, en provenance du privé, des collectivités territoriales ou de l'Union européenne. Au total, ce sont 60 milliards qui devraient être mobilisés, au-delà du seuil des 50 milliards que nous avions été un certain nombre à considérer comme nécessaire pour obtenir une véritable rupture avec la faiblesse chronique de l'investissement civil de l'État.

Dans les mois à venir, ces crédits devront être engagés pour des projets de qualité exécutés de façon responsable de façon à porter leurs fruits.

À cet égard, on peut se réjouir de la nomination de René Ricol comme commissaire général à l'investissement, sous l'autorité directe du Premier ministre, ce qui marque l'importance que celui-ci accorde au grand emprunt et devrait renforcer l'autorité du commissaire pour arbitrer entre les dossiers qu'il aura à connaître.

Les modalités pratiques retenues – création de programmes budgétaires spécifiques, gestion des fonds après conventionnement par des opérateurs, dotations non consomptibles pour certains financements de long terme comme les universités – semblent de nature à garantir la sanctuarisation des fonds du grand emprunt et, pour une partie, l'engagement de long terme nécessaire à la réussite de ces investissements.

Cependant, ces mêmes modalités aboutissent à faire disparaître ces fonds du champ du contrôle du Parlement, d'où l'importance d'un suivi accru. La présence de parlementaires au comité de surveillance est donc indispensable. Ce comité de surveillance devra se réunir régulièrement et pas seulement une fois par an si nous voulons avoir un contrôle effectif de l'évolution de la consommation des crédits. L'élaboration d'un « jaune » spécifique est un premier pas, qui devra être complété par l'adoption des amendements de la commission des finances à ce sujet, notamment la transmission des conventions avant signature au Parlement et l'information de celui-ci sur les conséquences pour les finances publiques de l'utilisation de ces fonds, y compris pour la partie non prise en compte pour le calcul du déficit.

Par ailleurs, l'analyse des missions introduit pour la première fois de façon explicite et répétée une distinction claire entre les enveloppes consomptibles et non consomptibles. Si je ne conteste bien évidemment pas cette dernière notion, qui permet de doter des projets de moyens dans la durée, il peut exister des urgences liées au risque de déclassement de notre pays dans certains secteurs, risque que nous avons abordé dans la tribune que j'ai signée avec un certain nombre de mes collègues. Cela suppose que le curseur entre les enveloppes ne soit pas fixé a priori et de façon arbitraire mais prenne en compte la réalité des financements à mettre en place, ce que doit permettre un dialogue réel entre le gestionnaire du programme et le responsable des projets.

Pour éviter toute dispersion, le projet de loi limite le saupoudrage, mais aussi, et heureusement, le nombre d'opérateurs concernés. Parmi eux se trouve la Caisse des dépôts et consignations et sa filiale, le fonds stratégique d'investissement, qui ne sont pas, rappelons-le, des opérateurs au sens de la LOLF.

Cette implication se fait selon des modalités différentes, de la simple gestion au pilotage, à un très haut niveau, puisque la Caisse des dépôts est concernée directement ou indirectement à hauteur de 8,5 milliards. Elle gérera le fonds national pour la société numérique, dans ses deux volets, infrastructure et développement des services, doté de 4,5 milliards d'euros, le fonds d'un milliard dédié au transport et à l'urbanisme durable, les 500 millions consacrés à la formation en alternance et les 500 millions dédiés au renforcement des pôles de compétitivité, et, au sein du FSI, le fonds nouveau de 400 millions destiné à l'amorçage et celui de 100 millions destiné à l'entrepreneuriat social et solidaire.

Si le rôle de la Caisse est reconnu dans des secteurs où son expertise a fait ses preuves, ce qui correspond aux priorités qui avaient été affichées dans son plan stratégique Élan 2020, je voudrais, madame la ministre, revendiquer très clairement pour elle ce soir un rôle central dans le volet universitaire.

La Caisse des dépôts s'est en effet engagée depuis 2007 aux côtés des universités. Une convention de partenariat a été signée avec la Conférence des présidents d'université en juin 2009. Elle accompagne et conseille les universités à travers des études générales ou ponctuelles leur permettant d'établir leurs schémas directeurs de modernisation. Fin 2009, elle avait ainsi signé cinquante et une conventions partenariales avec 132 établissements d'enseignement supérieur, mené sept études transversales pour la CPU et participé à l'élaboration de quarante-cinq schémas directeurs, pour un coût total de 23 millions d'euros.

En aval, elle accompagne la réalisation des schémas directeurs et a prévu à ce titre de mobiliser d'ici à 2012 un milliard d'euros de fonds d'épargne pour leurs projets immobiliers et 450 millions de fonds propres dans la réalisation des schémas directeurs, avec 63,5 millions de fonds d'épargne d'ores et déjà engagés sur trois universités.

Si des projets sont sortis, c'est parce que les arbitrages ont été rendus par le Premier ministre pour inventer ce que l'on appelle maintenant des partenariats public-public.

Si l'on ne confie pas un rôle pivot à la Caisse des dépôts sur le volet universitaire, nous nous poserons dans deux ans les mêmes questions que Gilles Carrez a posées cet après-midi sur ce qui a été fait des crédits d'EDF et nous n'avancerons pas. Elle a une réelle capacité d'expertise, qui ne remet pas en cause l'autonomie des universités mais qui peut permettre à ces dernières de réussir cette autonomie.

Pour que tout soit très transparent vis-à-vis de la représentation nationale, je souhaite également, officialisant d'ailleurs une pratique que nous avons mise au point avec Augustin de Romanet depuis nos prises de fonction respectives, que l'ensemble des conventions liant la Caisse à l'État sur le grand emprunt soient soumises à la commission de surveillance de l'établissement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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