Le Gouvernement demande aux communes d'assumer sans aucune compensation cette charge supplémentaire. Les enjeux de la suppression de l'article 89 sont de taille : il s'agit de maintenir des écoles sur tout le territoire, en particulier dans les zones rurales, et d'éviter d'alourdir les finances communales. En effet, le coût de l'application de l'article 89 a été estimé à environ 300 millions d'euros.
Ces enjeux sont d'autant plus d'actualité que le succès de l'école privée est une réalité, alors que l'on dépouille de plus en plus l'école publique des moyens et des conditions nécessaires pour accomplir sa mission. Les raisons de la scolarisation dans le privé sont souvent bien loin des contingences religieuses ou confessionnelles. De plus en plus, le choix d'un établissement privé se fait pour des raisons négatives, c'est-à-dire pour éviter l'école publique de son secteur, et bien souvent pour des raisons de ségrégation sociale… Car si, en principe, les établissements privés scolarisent des enfants de toutes catégories sociales, les statistiques montrent que, majoritairement, les catégories dites favorisées y sont surreprésentées, et ce pour plusieurs raisons : les établissements privés ne sont pas soumis à l'obligation d'accueillir tous les enfants et peuvent donc choisir leurs élèves ; ils ne sont pas non plus soumis à la sectorisation ; ils peuvent choisir l'organisation de la journée scolaire, et le nombre d'élèves par classe y est inférieur. Ainsi, la moyenne des classes en maternelle et en primaire est de 19,4 élèves dans le privé, alors qu'elle est de 23,8 élèves dans le public. Pour l'académie de Paris, la moyenne est de 24,7 enfants dans le public, contre 20 dans le privé. Pour l'académie de la Réunion, elle est de 24,3 élèves dans le public, contre 18 dans le privé. Il est plus facile, dans ces conditions, de mieux prendre en charge les élèves ! Il est évident qu'inscrire son enfant dans un établissement privé est un choix individuel et personnel. Mais la collectivité n'a aucune raison de prendre ce choix à sa charge par le biais des impôts locaux, surtout si cela met en péril l'école publique et les finances communales. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Pour conclure, si nous considérons que l'éducation est un droit fondamental, que tous les citoyens doivent y avoir accès et recevoir la même éducation, quels que soient leurs moyens et quelle que soit leur commune de résidence, si, après les déserts médicaux, les déserts judiciaires, nous ne voulons pas voir fleurir les déserts scolaires…