Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, comme en première lecture, le groupe GDR a déposé une motion de rejet préalable sur ce projet de loi organique relatif à l'article 13 de la nouvelle Constitution. Vous le voyez, nous avons la force de nos convictions !
Il ne s'agit pas de jusqu'au-boutisme, simplement d'une grande cohérence. Au stade de la deuxième lecture – étape qui ne m'est pas familière, étant donné l'usage intensif qui est fait de la procédure législative accélérée depuis 2007 – je me dois d'être parfaitement explicite sur nos motivations.
Il existe un gouffre entre notre conception de la démocratie et celle de l'UMP. Comme vous le savez, le cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution prévoit que le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce désormais, pour certains emplois ou fonctions dans les grandes institutions ou grandes entreprises nationales, après un avis des commissions permanentes compétentes des deux chambres du Parlement. Il prévoit aussi le Président de la République ne peut pas procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs des commissions représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés.
Je n'insisterai pas sur le caractère absolument ridicule du seuil retenu, qui place encore un peu plus l'opposition en position d'observatrice des choix de la majorité. Ce déni de démocratie a été largement commenté.
Pour défendre cette motion de rejet préalable, j'insisterai surtout sur la logique profonde de notre Constitution.
Le schéma démocratique est le suivant : tous les cinq ans, les Français sont appelés à plébisciter un chef suprême, le Président de la République. Tous les cinq ans, dans la foulée, on demande aux Français de flanquer ce chef suprême d'une majorité présidentielle, afin qu'il puisse agir. Les députés de cette majorité, hormis quelques exceptions notables, ne conçoivent leur fonction de représentation des Français que dans le soutien inconditionnel au chef de l'État.
La conséquence directe de ce système et de la pratique politique actuelle est incontestablement l'affaiblissement du Parlement, réduit au rang de grosse machine à voter. Cette grosse machine serait d'ailleurs devenue trop lente aux yeux du Gouvernement, d'où le recours quasi-systématique à la procédure accélérée pour l'examen de la loi, d'où la limitation du temps de parole des députés, d'où, aussi, le renforcement du travail en commissions permanentes, afin de gagner du temps en séance publique. Nous dénonçons cela depuis longtemps maintenant.
Avec la nouvelle Constitution, nous allions voir ce que nous allions voir !
Les faits nous donnent entièrement raison. Les journées d'initiative parlementaire, présentées comme une révolution, sont de véritables journées de dupes pour l'opposition. C'est tout le Parlement, et pas seulement l'opposition, qui se trouve ridiculisé quand le Gouvernement oppose le vote bloqué à toutes nos propositions de loi. C'est le travail parlementaire lui-même qui est vidé de sa substance. Ce sont le droit d'amendement, le droit de vote et le droit d'élaborer la loi qui sont confisqués à la représentation nationale.
Pour l'exécutif, le Parlement ne compte pas pour grand-chose. Nous étions déjà à la niche, voilà qu'on nous met la muselière ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)