Toutes les questions m'ont semblé intéressantes. Celle qui portait sur la tournée de la Comédie française en Europe a pointé un risque qui existe toujours : celui que la politique culturelle ne se réduise à une simple représentation de la culture nationale. Tout le monde se réjouit que la Comédie française parte en tournée à l'étranger, mais la mission de l'action culturelle est bien différente. Elle consiste à créer des contacts interculturels et à construire des projets avec d'autres pays. Par exemple, si l'on décide de lire des textes d'écrivains, il faut organiser des rencontres. Il importe donc de créer des structures autonomes dont l'État définira clairement les missions.
En matière d'autonomie, la position de l'Allemagne est simple. Il n'existe pas chez nous de ministère de la culture, et le principal interlocuteur de l'institut Goethe est le ministère des affaires étrangères.
Le problème de la formation du personnel culturel est complexe. Depuis le milieu des années 1990, l'institut Goethe a renoncé à dispenser une formation généraliste visant à permettre à chaque agent de travailler dans des pays différents. Nous formons désormais à des spécialistes d'une région ou d'une langue. La diversité des pays et des cultures est telle que le travail interculturel exige en effet une connaissance des territoires. Par conséquent, il faut réfléchir avant de créer une formation centralisée.
Le réseau EUNIC n'a malheureusement pas d'antenne à Paris, mais il devrait y trouver sa place du fait de l'existence d'un réseau mondial des instituts culturels. Sous la présidence française de l'Union, EUNIC a en tout cas permis à un projet important – Alter Ego – de se déployer dans quinze pays grâce à des moyens européens.
Il est cependant difficile de savoir si l'on doit rester fidèle au principe de subsidiarité, qui permet à chacun de rester chez soi, ou mettre en place des colocations – à Rotterdam, l'institut Goethe et le centre culturel tchèque, tous deux autonomes, sont installés dans le même bâtiment – ou des collaborations – en novembre, les célébrations de la chute du mur de Berlin ont permis la formation d'importants projets franco-allemands. Peut-être des liens peuvent-ils être créés, en dépit des difficultés, notamment comptables, qui se posent toujours. Dans certaines institutions, ne pourrait-on imaginer qu'un directeur et un directeur adjoint, l'un allemand, l'autre français, échangent leur poste chaque année ou que les deux soient placés sur le même plan ? Il est regrettable, par exemple, qu'après les attentats du 11 septembre, à New York, l'Allemagne ait créé un vaste programme visant à favoriser le dialogue culturel entre l'Europe et l'islam, sans même penser à y associer la France. Un projet bilatéral aurait peut-être pris ensuite une dimension multilatérale.