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Intervention de Joël Giraud

Réunion du 27 novembre 2007 à 9h30
Abrogation de l'article 89 de la loi relative aux libertés et responsabilités locales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJoël Giraud :

Il s'agit, à côté de l'universalisme, de la tolérance, qui permet d'accepter les différences conformes à la loi républicaine ; de l'humanisme, qui mise sur le développement des qualités essentielles de l'être humain ; de la solidarité, garante de l'équité sociale et d'une société vraiment active et responsable ; de la laïcité enfin, qui garantit à chacun une liberté de choix dans le respect des autres.

L'école a toujours été au coeur des débats de société relatifs à la laïcité, et celle-ci provoque régulièrement en son sein beaucoup d'interrogations et d'inquiétudes. Périodiquement, la question de la laïcité revient en effet en milieu scolaire et mobilise alors la nation tout entière : je pense notamment à la loi Debré en 1959, au projet Savary en 1984, aux différentes affaires touchant au voile islamique à partir de 1989 – lesquelles ont abouti à la loi du 15 mars 2004 –, ou encore au projet de révision de la loi Falloux en 1994. Depuis plus d'un siècle, la République et l'école se sont construites l'une avec l'autre : l'école de la République, ciment de la nation, est ainsi la vraie source de l'identité française – bien loin de tests ADN plus que contestables.

Valeur fondamentale de notre République, la laïcité est en grande partie entrée dans l'État par son école : comment s'étonner, dans ces conditions, que celle-ci soit si fortement impliquée à chaque fois que le principe de laïcité est réinterrogé dans l'ensemble de la société ? Le combat laïque se justifie à l'aune d'une morale républicaine : l'école forme les citoyens et assure l'unité de la nation, les enseignants étant porteurs de l'intérêt général. C'est pourquoi l'école privée doit rester marginale et, au contraire des affirmations de certaines églises, la République ne doit pas dissocier la laïcité de l'État et celle de l'école.

C'est dans ce contexte qu'il faut s'interroger sur les conséquences de l'article 89 de la loi du 13 août 2004, qui rend obligatoire la contribution des communes de résidence aux frais de scolarisation des enfants fréquentant une école privée sous contrat d'association d'une autre commune, alors que ce financement est facultatif et soumis à des critères conjuguant intérêt général et particulier pour les enfants fréquentant une école publique. L'article 89 tend à ignorer l'intérêt général au profit de seuls intérêts particuliers : d'abord en favorisant sans limites la scolarisation dans une école privée ; ensuite en incitant, parce qu'elle la facilite, à la scolarisation hors de la commune de résidence. Il tend à infliger une double peine aux communes : d'une part en provoquant l'exode scolaire, voire la désertification progressive des zones rurales et la fermeture de classes ou même d'écoles ; de l'autre en imposant des charges obligatoires non prévisibles et non maîtrisables, évaluées à environ 1 000 à 1 500 euros par élève. Les communes de banlieue ou rurales qui ont moins de ressources paieront pour la ville centre, Nanterre pour Neuilly et Decazeville pour Rodez !

L'article 89 introduit aussi une augmentation des dépenses d'éducation tout en réduisant les moyens de la commune affectés à ses écoles, en grevant sans information préalable et sans pouvoir opposable les budgets locaux – ce qui bafoue à nouveau le principe de libre administration des collectivités territoriales –, en augmentant les impôts locaux et en instaurant, pour le privé, un chèque éducation prélevé sans son accord sur la commune de résidence.

Que dire, mes chers collègues, de cette commune de 570 habitants de la Sarthe, Soulitré, qui se voit réclamer par l'école privée Sainte-Adélaïde de Montfort-le-Gesnois près d'un tiers de son budget communal ?

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