Madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, le deuxième débat que nous abordons aujourd'hui dans le cadre des débats demandés par la commission des affaires européennes nous conduit à aborder un sujet majeur et pourtant méconnu de la construction européenne : la lutte contre toutes formes de discrimination.
Comme tous les sujets qui touchent fondamentalement aux valeurs, cette question est complexe et renvoie à toute une série de questionnements moraux et philosophiques.
Les orateurs qui m'ont précédé à la tribune ont rappelé que 1'Europe s'est toujours construite autour de cette dimension politique, philosophique et morale. Les principes d'égalité et de démocratie ont été les fondements de cette édification. Pouvait-il d'ailleurs en être autrement, sachant d'où nous venons ?
On mesure d'autant plus aujourd'hui l'extraordinaire modernité et clairvoyance des pères fondateurs de l'Europe qu'ils ont articulé la politique européenne sur ces principes. Quand on pense que l'égalité salariale entre les hommes et les femmes a été rendue obligatoire dès le traité de Rome ! Même si, encore aujourd'hui, le compte n'y est pas, je n'hésite pas à le dire : l'Europe s'est bâtie sur des concepts révolutionnaires pour son époque. À nous de nous en montrer digne aujourd'hui !
Que l'Union se préoccupe encore d'améliorer son vaste arsenal de lutte conte les discriminations ne doit pas nous surprendre car l'Europe est, à elle seule, l'exemple concret de ce que peuvent donner le respect et la compréhension de l'autre. C'est sur ces concepts qu'elle s'est construite autour d'un axe franco-allemand que bien peu – sinon quelques visionnaires – imaginaient possible ! Pendant de longues années, la protection contre les discriminations s'est exercée essentiellement dans le champ professionnel. L'article 13 du traité d'Amsterdam, en 1997, change la donne en prohibant la discrimination pour six motifs : le sexe, la race ou l'origine ethnique, la religion ou les convictions, le handicap, l'âge, l'orientation sexuelle. À partir de cet article, trois directives ont été élaborées entre 2000 et 2004, couvrant intégralement le champ de l'emploi et du travail, mais non pas tout celui de la protection sociale, de la santé ni de l'éducation. C'est donc à quoi s'emploie la directive en discussion depuis juillet 2008.
Comme mes collègues qui se sont exprimés avant moi, je souhaite que vous fassiez, madame la secrétaire d'État, le point des négociations sur cette directive. Le rapporteur de la commission des lois, notre excellent collègue Guy Geoffroy, également corapporteur de la mission d'information, a rappelé les demandes d'évolution exprimées par nos deux commissions dans une proposition de résolution adoptée à la fin de l'année dernière. Ces préoccupations ont été aussi largement évoquées par nos collègues sénateurs. Pouvez-vous nous dire si elles seront prises en compte et si elles correspondent aux préoccupations du gouvernement français ? En outre, nous connaissons, pour les rencontrer souvent, les réticences de nos collègues allemands sur certains aspects de cette directive qu'ils perçoivent comme un frein possible à la reprise de la croissance. N'est-ce pas là un obstacle important, d'autant que l'unanimité est nécessaire pour adopter cette proposition de directive ?
Je m'interroge aussi, comme les derniers orateurs du débat précédent, sur la portée éventuelle d'un tel texte sur la question plus spécifique du handicap. Notre pays, il faut bien le reconnaître, n'est pas particulièrement en pointe, malgré les engagements pris, sur la question de l'accessibilité en particulier, sur laquelle la plupart de nos voisins européens ont fait des efforts bien plus considérables. Nous voyageons tous et nous pouvons le vérifier sans difficulté. Comment la France compte-t-elle traiter cet aspect de la directive, auquel nous ne pouvons que souscrire même si nous percevons les principales difficultés de sa mise en oeuvre ?
Mes chers collègues, la question de la non-discrimination est au coeur des valeurs de la République et de l'Union européenne. À ce titre, nous soutenons les initiatives qui iront dans le sens du renforcement de la non-discrimination, l'objectif étant évidemment qu'elles n'en restent pas au stade des grandes déclarations de principe, mais qu'elles soient pleinement applicables pour nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)