Madame la présidente, messieurs les secrétaires d'État, mes chers collègues, chacun reconnaîtra que les débats autour de la liberté d'enseignement et du financement public de l'enseignement privé ne sont pas récents. Déjà, l'adoption de la loi Falloux sur l'instruction publique, le 15 mars 1850, avait provoqué des remous à l'Assemblée nationale. Rappelons que, dans son article 9, la Constitution de 1848 proclamait : « l'enseignement est libre », tout en ajoutant : « La liberté d'enseignement s'exerce selon les conditions de capacité et de moralité déterminées par les lois, et sous la surveillance de l'État. Cette surveillance s'étend à tous les établissements d'éducation et d'enseignement, sans aucune exception ». L'enseignement primaire et secondaire se trouve désormais partagé entre l'enseignement public, géré par les communes, les départements et l'État, et l'enseignement privé, dit « libre » (« Non, privé ! » sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche), dont les établissements sont gérés par des particuliers, des associations ou des congrégations. J'appelle chacun à réfléchir à la phrase de Victor Hugo, qui, s'opposant à cette loi, déclarait : « Voilà comment je comprendrais l'éducation publique nationale, messieurs, à côté de cette magnifique instruction gratuite […] je placerai sans hésiter la liberté d'enseignement pour les instituteurs privés, la liberté d'enseignement pour les corporations religieuses ; la liberté d'enseignement pleine, entière, absolue, soumise aux lois générales comme toutes les autres libertés ». Chacun comprend bien qu'il ne rejetait ni le rôle ni l'utilité de l'enseignement privé, dont il ne craignait pas la concurrence.
N'oublions pas, mes chers collègues, que les écoles privées sont sous contrat, que les instituteurs qui y enseignent sont des agents publics et que leur rémunération est prise en charge par l'État, qui consacre 7 milliards d'euros au financement de l'enseignement privé, et que ces établissements sont engagés à fournir aux élèves un enseignement dont les programmes sont définis par l'État, ce qui justifie donc ce financement public.
C'est pourquoi je voudrais aborder trois points.
Tout d'abord, la question du financement public des écoles privées, qui est posée avant tout comme un problème politique. Or il faut sortir du dogmatisme politique dans lequel certains s'enferment par de purs calculs de politique politicienne.