Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Nicolas Perruchot

Réunion du 26 janvier 2010 à 21h45
Lutte contre les violences de groupes — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Perruchot :

Cette tendance s'est malheureusement confirmée avec les événements de Gagny que l'on ne peut oublier et qui sont les révélateurs de tendances profondes dans l'évolution actuelle de la délinquance, de phénomènes que la République ne peut ni ne doit en aucun cas tolérer. L'augmentation des violences commises par ce qu'il est convenu d'appeler des bandes, mais aussi l'installation de cette violence au sein des établissements scolaires est réelle. La semaine dernière encore, les villes de Bondy et d'Épinay-sur-Seine ont vu des affrontements opposer une quarantaine de jeunes dont certains en possession d'armes blanches !

Chacun d'entre nous qui, en tant qu'élu local, a été confronté à ce type de difficultés sait combien il s'agit là de phénomènes complexes et de tendances déjà anciennes.

Derrière le terme même de bandes se cache une réalité diverse et multiple et, de surcroît, un phénomène en perpétuelle évolution. Il convient à ce titre de distinguer les véritables regroupements structurés de délinquants, le plus souvent adossés à un réseau de trafiquants de stupéfiants voire à la criminalité organisée, d'une nébuleuse d'organisations plus informelles fédérées autour du sentiment d'appartenance à un territoire sur lesquelles elles estiment être en droit de dicter leur loi.

Pourtant, nombreux sont les outils juridiques qui ont été, au fil du temps, définis ici même pour combattre ces bandes : les derniers en date remontent à la précédente législature avec la loi du 5 mars 2007 sur la prévention de la délinquance, qui avait notamment permis de définir l'incrimination de guet-apens afin de répondre à la multiplication des attaques perpétrées contre les forces de police ou encore les sapeurs-pompiers.

Mettre un terme à l'emprise, purement inacceptable, des bandes sur certaines parties du territoire est un combat permanent. Il implique, pour les parlementaires que nous sommes, de toujours chercher à doter les forces de l'ordre des moyens qui leur permettront de répondre de la manière la plus efficace possible aux évolutions de cette forme de délinquance.

C'est pourquoi il importe notamment que puisse être définie à l'occasion de cette proposition de loi une incrimination spécifique de participation à une bande violente, qui viendrait combler les lacunes dont souffre à l'heure actuelle notre arsenal juridique.

Ainsi, en créant une infraction de participation à une bande, l'article 1er de cette proposition de loi permet une avancée notable dont nous nous réjouissons tout particulièrement. Dorénavant, il sera possible d'incriminer individuellement les membres d'une bande dont il aura été prouvé qu'ils ont l'intention de commettre des violences ou des dégradations.

Sur cet article, le désaccord est certain avec le Sénat qui, lors de son premier examen, a abaissé le quantumde peine à un an d'emprisonnement et à 15 000 euros d'amende. Le Nouveau Centre s'associe à la volonté de rétablir une peine de trois ans et de 45 000 euros d'amende telle qu'elle a été adoptée en première lecture sur nos bancs. Il s'agit pour nous d'un axe important de cette proposition de loi.

Toutefois, cette seule disposition ne peut en aucun cas constituer l'alpha et l'oméga de la lutte contre la loi des bandes. En aucun cas, elle ne peut nous affranchir d'un débat construit sur notre politique de prévention.

J'insisterai sur ce point. Le ministère de l'intérieur estime qu'à l'heure actuelle, près de 50 % des individus qui composent ces bandes sont des mineurs et parmi eux, un grand nombre n'aurait pas treize ans. C'est un constat que chacun d'entre nous peut faire : l'âge moyen des membres des bandes ne cesse de baisser et les délinquants sont de plus en plus jeunes.

De ce constat découle la nécessité de ne pas céder au tout pénal pour contrer le phénomène des bandes. Nous le savons, implantées sur des territoires souvent sinistrés, les bandes peuvent constituer pour certains jeunes un lieu attractif de socialisation souterraine et deviennent ainsi de véritables écoles de la délinquance.

Briser cette tendance implique d'ouvrir d'autres horizons à ceux qui sont tentés de rejoindre ces bandes. Un tel chantier implique un effort accru en direction de l'ensemble des acteurs qui concourent sur le terrain à la politique de prévention, que ceux-ci soient issus du monde éducatif et associatif ou encore de celui de l'entreprise.

À ce titre, il nous faut restaurer sur ces territoires la place de l'école et des établissements d'enseignement dans leur ensemble. L'école n'est, en effet, dans notre pays pas seulement le lieu où sont formés les futurs citoyens. C'est véritablement le lieu où se construit aujourd'hui la République de demain, un lieu où l'élève ne peut devenir victime.

Voilà pourquoi nous ne saurions en aucun cas fermer les yeux sur la banalisation de la violence au sein même des établissements scolaires, non plus que sur les agressions malheureusement répétées dont sont victimes les enseignants, mais aussi les personnels d'encadrement ou leurs proches. Il s'agit d'un phénomène inquiétant auquel nous devons remédier ; j'espère que cette affirmation suscitera un large consensus sur les bancs de notre assemblée.

Je retiens donc de cette proposition de loi les mesures visant à rendre plus dissuasives les peines encourues lors de l'agression d'un enseignant ou de l'un de ses proches. Dans le même esprit, je retiens également la correctionnalisation des peines pouvant être prononcées à la suite d'une intrusion injustifiée en milieu scolaire, assortie d'une gradation, en fonction des circonstances de l'intrusion, de la sanction susceptible d'être prononcée par le tribunal correctionnel. Cette mesure mettra fin au paradoxe en vertu duquel une intrusion de ce type ne pouvait être sanctionnée que comme une simple contravention, fût-elle de cinquième classe, alors même que les actes effectivement commis peuvent se révéler extrêmement graves. Nous avons malheureusement pu le vérifier il y a peu.

De ce point de vue, la réduction de la répression de l'introduction d'armes dans les établissements scolaires voulue par le Sénat ne nous paraît pas opportune, car cette disposition permet de couvrir les cas de port d'armes par destination. Cette précision nous semble fondamentale. Et, s'il n'est pas fait référence à la classification du code de la défense, c'est parce que la force de cette disposition réside dans son pouvoir de sanctionner l'introduction d'une arme sans motif légitime.

Mes chers collègues, cette deuxième lecture doit nous permettre d'effectuer un travail approfondi, utile à tous ceux qui sont aujourd'hui confrontés aux bandes et à leurs méthodes. Si les députés centristes soutiennent résolument le sens de cette proposition, son examen doit également permettre un débat fouillé sur notre politique de prévention de la délinquance, débat que nous ne pouvons plus reporter.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion