La proposition de loi relative au service civique a été adoptée par le Sénat le 27 octobre dernier. Déposé par notre collègue sénateur Yvon Collin, ce texte a été totalement remanié par M. Martin Hirsch, haut commissaire à la jeunesse.
Il ne s'agit pas de créer un nouveau dispositif qui viendrait s'ajouter à ceux qui existent déjà mais au contraire de donner davantage de cohérence à l'ensemble. Cet objectif est conforme aux déclarations du Président de la République, à Avignon en septembre 2009. Il faut d'ailleurs rappeler que le service civique faisait partie des programmes de tous les candidats à la dernière élection présidentielle.
Il répond à un double objectif : retrouver le lien social et l'effet de mixité que proposait le service national suspendu en 1997 et surtout redonner du sens à la notion d'engagement, principalement chez les jeunes, mais aussi pour toutes les autres classes d'âge.
Si la commission des affaires culturelles et de l'éducation est saisie au fond, le principe même de ce service civique, avec les allusions et les mentions au service national et le fait que la proposition de loi issue du Sénat mentionne la journée d'appel de préparation à la défense (JAPD), justifie parfaitement que notre commission s'en saisisse pour avis.
Je ne reviens pas sur toutes les déclarations nostalgiques à propos de la disparition du service militaire. Même s'il est maintenant idéalisé, il est tout de même intéressant de constater qu'il reste dans les mémoires comme un rite initiatique du passage de l'adolescence à l'âge adulte. Il me semble important qu'aujourd'hui, une possibilité soit offerte aux jeunes de donner du sens à cette notion d'engagement.
J'ai travaillé en étroite collaboration avec le rapporteur de la commission des affaires culturelles. Nous avons décidé de nous concentrer l'une et l'autre sur des enjeux différents de façon à compléter au mieux le texte.
S'agissant de la JAPD, je rappellerai qu'elle a vocation à clore un parcours citoyen délivré au cours de la scolarité aux jeunes filles comme aux jeunes hommes, en présentant notamment les missions et les métiers de la défense nationale. J'ai récemment assisté à une JAPD et constaté avec plaisir que les jeunes connaissaient plutôt bien nos institutions. Cela tranche avec les propos parfois défaitistes que l'on peut entendre. Il n'en reste pas moins que le contenu de cette journée gagnerait à être remanié.
Je ne reviendrai pas sur les différents types de volontariats que le ministre a rappelés. Je veux souligner que le service civique va permettre de rationaliser et de moderniser cet environnement complexe. La proposition de loi procède en effet à un regroupement des dispositifs sous un intitulé unique. Elle conserve toutefois les volontariats pour l'insertion, les volontariats internationaux et les pompiers volontaires qui obéissent à des règles spécifiques. L'ensemble des dispositions relatives au service civique trouve désormais sa place dans le code du service national.
Je tiens à attirer votre attention sur un point : la réussite du dispositif tient en grande partie à l'accompagnement. Le volontaire aura un tuteur ; il importe que l'organisme en charge du service civique s'assure de la réalité du suivi et de la qualité de la formation civique et citoyenne qui lui sera dispensée. C'est l'un des points forts du dispositif et je pense que notre collègue Patrick Beaudouin y veillera tout particulièrement car cela s'inscrit dans le champ de la mission que lui a confiée le Président de la République.
À ce titre, l'agrément délivré à l'organisme d'accueil sera décisif et il ne peut être une simple autorisation administrative. Nous pouvons par exemple nous appuyer sur les procédures d'Ubifrance qui est l'organisme en charge des volontariats internationaux en entreprise ou de Uni-Cité qui existe dans plusieurs régions. Ces deux organismes disposent en effet de référentiels qui peuvent servir de modèle.
J'en viens maintenant à la place réservée au monde de la défense dans le texte actuel. À part la mention symbolique du service militaire, il est seulement prévu que le service civique soit présenté lors de la JAPD. C'est une initiative très positive, mais elle ne doit pas se faire au détriment des éléments, déjà très contraints, consacrés aux enjeux de défense et de sécurité de cette journée.
Par ailleurs, le service civique risque d'entrer en concurrence avec les formes de volontariat, voire avec la réserve, alors que les viviers de recrutement pour nos forces sont restreints. Il importe donc que les différents dispositifs soient parfaitement coordonnés pour qu'ils se complètent efficacement sans se concurrencer.
Une clause de révision de l'ensemble du dispositif est prévue d'ici au 31 décembre 2011 qui permettra de le réajuster en fonction notamment des expérimentations. Je pense, par exemple, au regroupement des jeunes pour qu'ils bénéficient d'une formation civique et citoyenne harmonisée. Un effort particulier devra également être consenti pour le suivi du jeune tout au long de son engagement.
En conclusion, j'aimerais revenir sur la question de l'obligation que beaucoup d'entre nous souhaitions voir apparaître à terme. Elle a été écartée pour de multiples raisons, qu'il s'agisse des contraintes financières, de la difficulté à trouver les structures d'accueil pour 700 000 jeunes ou encore, comme l'a souligné Luc Ferry lors des auditions, de l'impossibilité d'assurer une coercition si le volontaire ne l'est pas, les associations n'étant pas demandeuses de jeunes engagés contre leur gré.
Au final, je crois que ce texte propose un système à la fois pertinent et nécessaire. Dans ce contexte je vous propose donc, mes chers collègues, de donner un avis favorable à l'adoption de cette proposition de loi, sous réserve des amendements que je vais vous proposer et que j'ai élaborés en liaison avec le haut commissaire et le rapporteur de la commission des affaires culturelles. À travers ces amendements, je souhaite que notre commission rappelle clairement le rôle de la JAPD. Renommée journée d'appel de préparation au service national (JAPSN) par le Sénat, je propose plutôt de retenir le terme de « journée défense et citoyenneté » (JDC), appellation qui recueille l'assentiment du ministère de la défense.
Nous devons également affirmer la force de l'engagement. Le service civique doit concerner des volontaires de 18 à 25 ans, pour une durée non sécable de six mois, renouvelable une fois. L'ouvrir à partir de 18 ans seulement est important à mes yeux car cela doit constituer un temps fort coïncidant avec l'entrée dans le monde adulte. Le ministre a cependant refusé d'exclure du dispositif les jeunes de 16 à 18 ans. Il faut cependant traiter des conditions d'accueil des mineurs : l'amendement réservant le service civique aux seuls majeurs pourra être retiré si nous obtenons des engagements forts du Gouvernement sur ce sujet. Parallèlement, l'idée d'un service volontaire senior, pour les plus de 25 ans, doit être examinée.
Par ailleurs, il faut faire en sorte que les domaines de la défense, de la sécurité et de la prévention fassent partie des champs du service civique.
Enfin, il me semble essentiel de toujours bien distinguer le service civique du bénévolat.