Là, il y aurait consensus.
Or, aujourd'hui, incontestablement, ce consensus est fortement remis en cause. La réduction drastique de l'autonomie fiscale des collectivités territoriales est un élément central de cette remise en cause.
Depuis 1982 et la réforme initiée par François Mitterrand, Pierre Mauroy et Gaston Defferre, le mouvement décentralisateur a permis de reconnaître aux collectivités territoriales la possibilité de déterminer librement une partie de leurs ressources.
Cette marge de manoeuvre fiscale constituait le corollaire indispensable de la libre administration des collectivités territoriales, dont le principe est affirmé par l'article 72 de la Constitution.
Cette liberté a toujours eu pour contrepartie l'obligation faite aux élus locaux d'assurer l'équilibre des budgets des collectivités territoriales. Cet équilibre a pu être apprécié au plus près des besoins de la population.
Mais le Gouvernement a souhaité revenir sur ce mouvement décentralisateur, seul garant de la satisfaction des intérêts des Français.
L'un des moyens les plus efficaces de ce processus de recentralisation à rebours du sens de l'histoire a consisté dans la réduction draconienne de la part des ressources propres des collectivités territoriales, avec comme point d'orgue, il y a quelques semaines, la suppression de la taxe professionnelle.
En remplaçant la plus grosse part de la fiscalité directe des collectivités territoriales par une dotation provenant du budget de l'État, le Gouvernement rétablit sa tutelle et achève de les conduire à une situation financière insoutenable. Certaines d'entre elles sont déjà dans ce cas. Plus de vingt départements auront un résultat d'exercice 2009 déficitaire.
L'Assemblée des départements de France a sollicité une audience de toute urgence auprès du Premier ministre pour évoquer la situation des premiers départements faisant face à de graves difficultés financières. Celui-ci, à ce jour, n'a pas donné de réponse à cette demande d'audience. Il y a urgence, monsieur le ministre. Il a répondu, mais il n'a pas indiqué de date pour une audience. Il a dit qu'il allait s'informer, rassembler les éléments. Mais, pendant ce temps, les départements sont dans la panade, pardonnez-moi l'expression.
Ces mauvais coups portés aux collectivités territoriales ne se limitent pas, à mes yeux, à la seule autonomie fiscale. C'est aussi leur autonomie financière qui est malmenée.
Car les effets de la réforme fiscale se conjuguent avec ceux de la politique de compression des dotations attribuées aux collectivités locales.
La loi de finances pour l'année 2010 aura pour conséquence d'accroître la dette de l'Etat envers les collectivités territoriales, ces dernières enregistrant de lourdes pertes.
Les premières simulations sur les futures ressources des collectivités territoriales réalisées par Bercy ont été connues le 8 janvier dernier. Je conseille aux collectivités territoriales de ne pas s'y fier pour leurs projections budgétaires. En effet, ces simulations ne sont pas satisfaisantes. Elles ont d'ailleurs fait l'objet de vives critiques de la part des spécialistes. Une analyse approfondie réalisée par un cabinet spécialisé dans les finances des collectivités territoriales a mis en lumière des oublis et des anomalies.
Autonomie fiscale réduite à la portion congrue, autonomie financière menacée : après ces multiples attaques, on pouvait croire que le Gouvernement pourrait faire l'économie d'une réforme territoriale achevant de mettre à mal les collectivités.
J'ai déjà eu l'occasion de le dire ici même à plusieurs reprises : le Gouvernement pourrait se dispenser de proposer, dans le cadre de la réforme territoriale, de supprimer la clause générale de compétence des départements et des régions, puisque les départements comme les régions n'auront plus les moyens de l'exercer.
Par ailleurs, l'autonomie financière, reconnue par la Constitution, et l'autonomie fiscale, pratiquée depuis plusieurs années, ont un corollaire indispensable : la péréquation.