Je vais décrire brièvement le contexte économique et financier dans lequel s'inscrit la réflexion sur l'avenir de l'AFP, évoquer les limites et les freins au développement de celle-ci, et rappeler la méthode et les tentatives de réformes qui ont eu lieu dans le passé.
Les agences de presse les plus importantes sont Associated Press, l'Agence France Presse et Reuters. Depuis quelques années, le monde des agences internationales connaît des mouvements importants, de concentration notamment. Or, le rôle de telles agences est fondamental, dans la mesure où c'est vers elles que se tournent les agences nationales pour se procurer des informations européennes et internationales.
Parmi les opérations capitalistiques de grande envergure, une des plus récentes fut la fusion de Reuters et Thomson Financial, groupe au sein duquel l'activité d'agence de presse généraliste diminue : elle ne représentera plus que 5 % du chiffre d'affaires total de l'agence. De fait, les grandes agences d'envergure internationale qui veulent offrir une information diversifiée et exhaustive, comme le fait l'AFP, doivent y consacrer des moyens techniques et humains considérables.
Parallèlement à ce contexte économique et financier, le métier de l'agence de presse évolue, avec la nécessaire modernisation des outils de production et de diffusion. Le développement de l'internet nous a rendus très exigeants en matière de rapidité de l'information et d'interactivité. Pour y faire face, les agences ont dû refondre leur organisation, leur système d'information et donc consentir des investissements lourds. Par ailleurs, le rôle pris par la photo et l'importance de la vidéo ont entraîné la mutation d'un certain nombre de métiers.
Les contenus de l'information évoluent eux aussi. On a maintenant besoin d'une information spécialisée, ciblée vers des professionnels – la fusion Reuters-Thomson Financial le montre –, dans un contexte de gratuité de l'information, en particulier sur internet qui prend une place de plus en plus importante. Les moteurs de recherche, en particulier Google, banalisent, tout au moins en apparence, le rôle des agences et amènent à réfléchir autour de nouveaux modèles économiques.
Dans un tel contexte, l'AFP dispose d'atouts considérables, qu'il s'agit de conforter. Moderniser son statut l'aiderait à répondre aux défis auxquels elle est confrontée. L'absence de capital social et l'obligation d'adopter un budget en équilibre freinent en effet son développement et la conclusion de partenariats qui lui permettraient de répondre à la diversification de la demande – qui va de l'information la plus généraliste et la plus immédiate à une information très ciblée et spécialisée – et de faire face à certaines concurrences, notamment dans le secteur de l'information financière. Étant donné les atouts dont elle dispose, en particulier son professionnalisme, l'Agence a les moyens de construire des offres ciblées et diversifiées ; il serait vraiment dommage, pour l'AFP et pour son rayonnement international, de passer à côté de cette chance formidable.
Chacun connaît l'histoire de l'Agence, qui a démarré en tant qu'établissement public. Chacun se souvient de la difficulté avec laquelle fut adopté le statut de 1957 – on y réfléchissait depuis 1948 ! – et des tentatives postérieures de réformes, dans les années quatre-vingt et en 1999-2000.
La réforme de l'AFP, pour lui permettre de se moderniser, pour lui donner les moyens de son développement et de son rayonnement, doit passer par une méthode partagée au sein de l'Agence et portée par l'Agence elle-même. Mais cette méthode doit être aussi partagée par le Parlement. À cet égard, la réflexion que vous avez engagée sur l'avenir de l'AFP est très précieuse. Par ailleurs, le ministre de la culture et de la communication a, de son côté, installé un comité d'experts, dont les travaux viendront enrichir les vôtres. De fait, il s'agit de provoquer l'adhésion la plus large possible autour de cette réforme.