Cette proposition n'eût-elle servi qu'à engager ce débat, elle aurait déjà été utile.
Par ailleurs, je regrette que la discussion ait dérivé vers la question de la concurrence qui, si elle est proche du sujet, n'en constitue pas pour autant le coeur.
C'est parce que nous avons besoin, eu égard au droit européen, d'une véritable sécurisation juridique des services sociaux que nous avons proposé le mandatement, nouveau moyen d'action offert aux gestionnaires locaux qui s'ajoute aux interventions en régie, ou dans le cadre d'une délégation de service public, ou encore dans le cadre de la législation sur les marchés publics, mais aussi au subventionnement direct – instrument menacé, non par la directive, mais par le « paquet Monti-Kroes ». À cet égard, le mandatement offrira un cadre nettement plus sûr et un recours plus aisé que la procédure des marchés publics, tout en préservant une forme de régulation par l'autorité publique. Il y a donc là un progrès possible, et un travail à poursuivre. Cela n'empêche évidemment pas – mais c'est un autre sujet – une collaboration entre les secteurs privé et public : dans les services à la petite enfance, il est par exemple tout à fait possible de faire appel à différents opérateurs.
M. Fasquelle juge cette proposition inutile et en appelle au rapport de M. Michel Thierry ; or, outre que ce dernier considère à titre personnel qu'une transposition législative s'impose – il évoque même un « bloc législatif » –, l'article 4 de la proposition reprend l'idée de convention de partenariat d'intérêt général qui est issue de son travail.
Par ailleurs, vous estimez que le secteur de la petite enfance sera protégé mais, dès lors qu'il est inclus dans la directive, ne risque-t-il pas d'être considéré à l'instar de n'importe quel autre, alors que sa dimension éducative, par exemple, me semble patente ? L'arrivée massive du secteur privé n'entraînera-t-elle pas à terme et au nom de la concurrence une révision des normes à la baisse ? Mais, on peut supposer que le Gouvernement, incapable de créer les 200 000 places supplémentaires qu'il a promises, souhaite la dérégulation de ce secteur – elle est d'ailleurs engagée en ce qui concerne les assistantes maternelles !
Je m'inscris également en faux contre l'idée selon laquelle nous réécririons la directive : comme l'ont fait vingt États membres, nous nous contentons de la transposer.
Bernard Perrut, quant à lui, a peut-être été rassuré à trop bon compte : ce n'est pas parce que le Gouvernement justifie le bien-fondé de l'ensemble des régimes d'autorisation qu'aucun débat avec la Commission européenne n'aura lieu. Dans la discussion avec les autres États membres, il est peut-être stratégiquement utile de placer la barre un peu haut afin de peser sur les négociations à venir, et ce d'autant que le Gouvernement a jugé bon de lâcher du lest vis-à-vis de la Commission. Je rappelle, de surcroît, que la protection des services sociaux d'intérêt général était censée constituer une priorité de la présidence française de l'Union !
Mon désaccord est bien entendu total avec Jacques Domergue, qui préfère d'emblée réviser nos normes sociales à la baisse : si nous voulons tuer l'idée européenne, continuons dans ce sens !
Roland Muzeau a, quant à lui, raison de souligner l'écart qui sépare les positions de la Commission et du Parlement européens : si un compromis s'est fait jour, les tensions n'en demeurent pas moins sensibles. Pour le reste, nos divergences sur la question du Traité sont connues.
Enfin, je considère que c'est la méthode utilisée par le Gouvernement – et non le remarquable travail accompli par les différentes administrations – qui génère de la méfiance à l'endroit de l'Europe. La mise à l'écart du Parlement, comme toujours, est préjudiciable au travail démocratique.