La Cour s'est posé la question de savoir si l'évolution de la situation de la RATP lui assurait un développement économique durable.
La Cour a, pour la période allant de 2001 à 2007, examiné la gestion du personnel, en tenant compte de l'incidence des lois aménageant le temps de travail et réformant le régime des retraites. Cet examen portait sur deux aspects : les ressources humaines, à savoir l'évolution des rémunérations et du nombre d'emplois, et l'organisation du travail.
Force a été de constater que la RATP n'avait pas mis en oeuvre de politique propre à lui assurer une productivité suffisante. En effet, en intégrant les effets sur les comptes de l'entreprise de la réforme du financement des retraites, les salaires et les charges sociales ont progressé de 22,3 % sur la période, soit une hausse de 3,18 % par an, largement supérieure à l'inflation. Quant aux effectifs, ils ont progressé de 8,7 % de 2000 à 2007, en raison notamment de l'aménagement du temps de travail. Les rémunérations brutes ont, quant à elles, progressé de 3,1 %, soit bien plus que l'inflation annuelle, qui a été de 1,77 %. Il en résulte que, sur cette période, la productivité aura été insuffisante pour corriger les déséquilibres d'un budget grevé par une dette considérable.
Il est à noter que la productivité est devenue, depuis, un des objectifs du contrat liant la RATP et le STIF. Dans son « Plan Ambition 2012 », la RATP s'est engagée à atteindre l'objectif de 2 % d'accroissement de la productivité par an, soit nettement plus que le 0,5 % constaté durant la période sous revue. Cet objectif de 2 % est d'ailleurs atteint en 2008. Il faudra suivre de près cet indicateur.
Nous avons recherché si les investissements à l'origine de la dette avaient généré suffisamment de cash flow pour atténuer la charge de la dette. Nous avons dû constater que la RATP a pris des décisions sujettes à caution en matière de choix de projets, faute d'avoir estimé leur rentabilité financière. La RATP a d'ailleurs reconnu que « sans dire que c'est le cas général, il peut être envisageable pour l'autorité publique de considérer que la réalisation d'une infrastructure lourde de transport va avoir une rentabilité positive pour la collectivité au sens du bilan socio-économique, mais une rentabilité négative pour la RATP. » Mais, aussi bien en termes de bilan socio-économique, de rentabilité financière ou de valorisation des gains de temps, les résultats sont éloignés des prévisions initiales.
La Cour met particulièrement en exergue l'abandon de la réutilisation de la petite ceinture ferroviaire, au profit des deux grands projets de tramways en voirie, le T2 prolongé et le T3 sur le boulevard des Maréchaux. Le rapport énumère les erreurs de procédure qui ont conduit la commission d'enquête sur le projet de prolongement de la ligne T2 à émettre un avis unanimement défavorable au projet. La Cour juge qu'il aurait été plus opportun de réutiliser la petite ceinture en améliorant le système de bus existant. Cela aurait permis d'éviter la congestion automobile que nous connaissons actuellement, ainsi que les projets actuels de métrophérique ou d'Arc Express : faute de parvenir à créer un véritable mode de transport régional à la périphérie de Paris, on n'a fait que reporter le trafic et les problèmes.
Quant à Meteor, cette incontestable réussite sur le plan technique a souffert d'un mauvais phasage, en ne faisant démarrer la ligne qu'à Madeleine, et non à Saint-Lazare, comme prévu initialement. Cette erreur initiale a entraîné des retards et des surcoûts, le coût prévisionnel augmentant de près de 65 %.
J'en arrive à la qualité du service. Dès la fin des années quatre-vingt-dix, la RATP a fait preuve de volontarisme dans ce domaine, notamment en édictant des normes qui ont été reprises par d'autres pays, notamment en Europe. Compte tenu de l'explosion du trafic – le record a été atteint en 2007, avec trois milliards de trajets – les résultats sont plutôt satisfaisants en matière de confort, de régularité, d'accueil, de propreté, de disponibilité des équipements et de sécurité. C'est pourquoi l'entreprise a pu, pendant toute la période, bénéficier en partie des bonus prévus par le contrat la liant au STIF.
Mais les points noirs persistent, arbres qui cachent la forêt. Il s'agit, comme nous le savons tous, des lignes 1 et 13 et des lignes RER A et B. il faut ajouter à cela les difficultés rencontrées de 2004 à 2007 par le service des bus, en raison des projets parisiens d'aménagement de voirie.