Nous le savons, partout où le statut de la poste a changé, une diminution du nombre de bureaux de poste et des effectifs a été observée, ainsi qu'une augmentation des tarifs.
La Poste joue un rôle d'aménageur du territoire, auquel nous tenons par-dessus tout. Forte de ses 17 000 points de contact, dont le Sénat a garanti le maintien, La Poste offre en théorie une très large couverture du territoire. Mais, dans la pratique, je peux témoigner de ce qui se passe en Ariège sur un territoire de montagne, cette affirmation mérite d'être nuancée.
Il y a quinze jours, nous débattions dans cet hémicycle, avec pratiquement les mêmes intervenants, de la fracture numérique. À cette occasion, j'ai rappelé à la représentation nationale que, selon nos territoires, nous n'étions pas tous égaux devant l'accès à internet. Parce que, économiquement peu attractifs, les territoires ruraux et de montagne sont délaissés par les opérateurs privés, qui leur préfèrent les zones urbaines, plus rentables.
Force est de constater que ces logiques comptables, qui poussent les opérateurs privés à ne pas investir sur nos territoires, se retrouvent également dans le domaine postal.
Nous souffrons actuellement d'une véritable fracture postale, avec une poste à deux vitesses. Il y a six ans, en Ariège, nous disposions de quatre-vingt-dix bureaux de postes de plein exercice, c'est-à-dire proposant toutes les activités postales ; désormais, nous n'en avons plus que treize, dans un département rural et de montagne qui compte 332 communes. À la place, des agences postales ou des relais poste ont vu le jour. Or ceux d'entre vous qui ont déjà fréquenté ce type de structures ne sont pas sans savoir qu'elles ne remplissent pas du tout la même fonction qu'un bureau de poste dit traditionnel.
La notion de fracture postale prend ici toute sa dimension : des usagers auraient la chance de disposer de bureaux de poste de plein exercice près de chez eux quand d'autres, notamment en zone rurale et surtout de montagne, doivent se contenter d'agences postales communales ou de points de contact.
Pour les territoires de montagne, c'est la double peine, monsieur le ministre : on diminue la présence postale au prétexte que l'utilisation des nouvelles technologies a fait diminuer l'activité postale, mais sur ces mêmes territoires, aucun effort d'équipement pour accéder à la toile n'est fait. Résultat des courses, moins de postes et aucune couverture numérique.
Comment voulez-vous que ces territoires qui connaissent une déprise industrielle importante, vous le savez, monsieur le ministre – les filières du bois, du papier, du textile sont en difficulté – puissent inverser la tendance s'ils ne sont même pas capables d'offrir à leurs habitants ou chefs d'entreprise le minimum nécessaire pour vivre ou exercer une activité professionnelle ?
Autre problème, et non des moindres, celui des horaires d'ouverture. Alors que dans les villes, les usagers se plaignent d'une plage horaire d'ouverture trop restreinte qui ne correspond pas à leur mode de vie, nous, dans les territoires ruraux, sommes confrontés à des points de contact qui n'ouvrent que quelques heures par semaine !
Comme l'un de mes collègues parlementaire l'a souligné à juste titre en commission des affaires économiques, « il ne faudrait pas que certains des 17 000 points de contact deviennent virtuels du fait de leurs horaires d'ouverture ». Il pointait du doigt une réalité que nos concitoyens ne connaissent que trop. Le secteur de Foix, ville préfecture de l'Ariège, a, par exemple, subi une diminution des horaires d'ouverture de ses bureaux de postes de quarante-cinq heures par semaine.
Se rendre à la poste est devenu un véritable parcours du combattant : dans un premier temps, et suivant la démarche à entreprendre, il faut se renseigner pour vérifier où il sera possible de l'effectuer ; dans un second temps, il faut contrôler les jours et les horaires où il sera possible de s'y rendre. Autant d'obstacles qui pénalisent l'usager !
Imaginez dans quel désarroi se retrouve une personne âgée qui souhaite simplement envoyer un recommandé ! Et je ne vous parle pas d'une démarche plus complexe, comme celle liée à l'ouverture d'un compte, qu'il n'est pas possible d'effectuer dans les agences postales communales, par exemple. Ainsi, pour l'Ariège, sur les cent un points de contact que compte le département, trente-cinq ne proposent pas de service financier, et seuls vingt-trois disposent d'un conseiller financier. Si l'objectif de la réforme et de la réorganisation de La Poste sur le territoire est d'optimiser son fonctionnement et ses résultats, les méthodes sont à revoir.
À l'heure actuelle, des études sont menées dans les différents bureaux de poste proposant des services financiers afin de fermer les moins fréquentés ou de réduire leurs horaires d'ouverture. Ceci est contre-productif et s'inscrit contre l'intérêt général.
Par ailleurs, les suppressions de postes massives enregistrées ces dernières années à la Poste – 7 720 en 2008, 11 500 en 2009 – ont des conséquences dramatiques sur nos territoires, notamment de montagne.
Quand on sait qu'un facteur malade ou en vacances n'est pas remplacé, comme c'est le cas dans mon département, il ne faut pas être surpris de devoir attendre plusieurs jours avant de recevoir son courrier. Donc J +1 ou J +2, ce n'est pas notre souci, nous qui sommes parfois contents de recevoir le courrier à J +7 ! Comment peut-on alors parler d'équité territoriale lorsque des personnes, suivant l'endroit où elles vivent, ne bénéficient pas de la même qualité de service ?
Je souhaite insister un peu plus sur les spécificités de la montagne. Il y a un instant, je vous ai expliqué les difficultés liées à la distribution du courrier et à l'accès au bureau de poste en temps normal. Imaginez ce qu'il en est lorsque nous avons des journées de neige, comme aujourd'hui à Paris ! Chez nous, en montagne, ces situations peuvent durer plusieurs mois, et vous avez été confronté au problème, monsieur le président de la commission.