Cette façon de procéder met en péril l'équilibre même des ressources qui assurent la pérennité de la Caisse. En effet, si l'on fait la somme des fonds engagés sur l'ordre du Gouvernement ou de l'Élysée dans le FSI voulu par le Président de la République – 10 milliards –, dans le renflouement de DEXIA – 2 milliards –, dans OSEO, dans le plan de relance, l'on réalise qu'ils représentent plusieurs dizaines de milliards d'euros et plus de la moitié des fonds propres de la CDC.
C'est aussi ce qui nous interpelle sur la provenance des fonds mobilisés par l'État, à l'heure où les contraintes qui pèsent sur son budget, d'un côté, et les charges de la dette, de l'autre, laissent peu de marges de manoeuvre financière. Si peu d'ailleurs qu'il faudra soumettre à impôt les indemnités journalières des accidentés du travail – 150 millions. Si peu que les aides publiques accordées aux entreprises se sont élevées à 65 milliards d'euros, exonérations fiscales comprises.
Une nouvelle fois, nous ne pouvons que dénoncer l'inconstitutionnalité de l'injonction faite par l'Élysée au mépris du principe de séparation des pouvoirs! La commission de surveillance de la CDC devrait en toute logique être saisie.
Nous avons par ailleurs entendu que « les textes applicables interdisent à la CDC de souscrire à une augmentation de capital d'un établissement public » et qu'il était donc nécessaire de modifier le statut de La Poste pour lui permettre de réaliser cette opération.
Or c'est exactement le contraire. La Caisse des dépôts, établissement public autonome du Gouvernement et placé sous le contrôle du Parlement, est avant tout un investisseur d'intérêt général et de long terme qui, à l'appui d'un mandat public, peut investir pour renforcer les fonds propres ou soutenir les projets d'investissement d'une autre personne morale de droit public.
Prenons l'exemple récent d'OSEO, EPIC agissant dans un champ hautement concurrentiel, qui regroupe la BDPME, l'ANVAR et la SOFARIS et que la CDC finance à plus de 40 % ou encore l'ANRU, EPIC financé par la Caisse des dépôts et d'autres opérateurs publics : rien dans le droit interne ou dans le droit communautaire, rien non plus dans la « doctrine d'investissement de la Caisse des dépôts » publiée en décembre 2008 après la promulgation de la loi LME, n'interdit à la Caisse des dépôts d'investir dans un établissement public.
Partenaire de La Poste depuis plus d'un siècle, dans une logique de complémentarité de missions publiques –aménagement du territoire, lutte contre l'exclusion bancaire, collecte et centralisation de l'épargne populaire –, la CDC pourrait donc parfaitement, dans le cadre d'un mandat public, investir dans le renforcement et la modernisation nécessaires des moyens de l'établissement public La Poste.
Vous prétendez que les missions de service public ne sauraient être menacées au prétexte que les seuls actionnaires, jusqu'à la publication des statuts initiaux comme le précise le texte, c'est-à-dire jusqu'au 31 décembre 2009, sont 100 % publics. Vous vous êtes vous-même engagé, monsieur le ministre, à ce qu'un amendement interdise tout autre investisseur que la CDC.
Mais ce qu'une loi a fait, une autre loi peut le défaire.