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Intervention de Louis-Joseph Manscour

Réunion du 7 décembre 2009 à 17h00
Déclaration du gouvernement sur la consultation des électeurs de guyane et de la martinique et débat sur cette déclaration

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLouis-Joseph Manscour :

À la départementalisation centralisatrice de 1946 s'est donc substituée, en 1981, la décentralisation – à ceci près que celle-ci n'est pas un statut, mais un processus de déverrouillage du modèle jacobin français hérité du colbertisme. Depuis lors, mes chers collègues, nous sentons – outre-mer bien plus qu'en métropole, du fait de notre insularité et de notre éloignement – les prémices d'une nouvelle ère historique à travers les libertés locales, le droit d'expression, l'abolition des tutelles ou la fin du contrôle a priori des préfets. Force est toutefois de constater que les transferts de compétences de l'État, mal compensés financièrement, n'ont pas permis l'émergence d'une véritable gouvernance locale. Ils auraient pourtant dû favoriser une nouvelle économie locale, susceptible d'atténuer la dépendance à l'égard du système redistributif français qui caractérise la départementalisation.

L'aggravation permanente du chômage, qui atteint jusqu'à 30 % des actifs, la destruction de l'appareil productif agricole et industriel, l'affaiblissement de la valeur travail et l'explosion des contrats aidés et du RMI, qui pérennisent la précarité, nous ont rapidement convaincus de la nécessité d'encourager davantage l'émergence d'un nouveau modèle, aujourd'hui consensuel : le modèle endogène. Il faut donner un nouveau souffle à la gouvernance locale, en alliant responsabilité et développement.

Ce que les élus ont peut-être peiné à faire comprendre aux autorités étatiques, la mobilisation sociale de février 2009, qui a embrasé la Guyane, la Guadeloupe et la Martinique, l'a crié dans les rues de Cayenne, de Pointe-à-Pitre et de Fort-de-France pendant plus de trente jours. Aujourd'hui, mes chers collègues, je n'aurai aucun mal à vous convaincre que, pour nos populations, l'heure des solutions politiques et économiques a sonné. Il nous faut désormais passer à une nouvelle étape : la construction de projets opérationnels lisibles pour les acteurs économiques et sociaux et adaptés à leurs attentes. Il nous faut donner un sens à la construction de cette gouvernance locale.

Pour autant, au prétexte qu'une grande majorité de nos compatriotes souhaite que les acteurs de nos territoires jouissent de responsabilités accrues, fallait-il, en cette période d'incertitude croissante, remettre précipitamment à l'ordre du jour le processus d'évolution institutionnelle et statutaire ? À nos yeux, ce dernier a été mal engagé. Je le répète, on ne peut pas se dissimuler derrière le vote de quelque soixante-cinq élus, certes légitimes, mais trop peu nombreux au regard des enjeux considérables en question. Il eût mieux valu solliciter l'accord de tous les élus martiniquais, soit plus de neuf cents personnes, maires, conseillers municipaux et parlementaires réunis. On ne saurait opposer les bons élus, partisans de l'article 74, aux mauvais, défenseurs de l'article 73 – ou inversement.

Nous, socialistes martiniquais, nourrissons une aversion particulière pour le clanisme. Notre seul camp est celui de la Martinique. Nous avons fait le choix de l'article 73 révisé en 2003, qui nous offre la possibilité d'une évolution institutionnelle maîtrisée et sécurisée, et non celui d'une évolution statutaire dans le cadre de l'article 74, dont on ne maîtrise pas les contours et qui dépendra du bon vouloir de l'exécutif et du Parlement français.

« Lors de l'examen de la loi organique, nous savons qu'il nous faudra ferrailler », vient de dire Christiane Taubira. Mon père était ferrailleur. (Sourires.) Je sais ce que c'est que de ferrailler. Mais je ne veux pas que le peuple martiniquais soit obligé de ferrailler pour surmonter ses difficultés actuelles.

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