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Intervention de Geneviève Gaillard

Réunion du 3 décembre 2009 à 15h00
Planification écologique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeneviève Gaillard :

À cette époque, les États-Unis confrontés à la détérioration accélérée de leur environnement furent les premiers à rechercher systématiquement et à mettre en oeuvre les techniques de planification écologique comme l'acquisition de servitudes par la puissance publique, la participation des citoyens à la décision… Bref, tout cela a déjà été expérimenté aux États-Unis, et cela a marché.

Sur le terme « écologique », on rencontrera beaucoup d'appréhensions tant aujourd'hui toutes les familles politiques s'en sont approprié les valeurs stigmatisées hier, car associées à une douce idée utopiste, et souvent strictement réservées à nos amis Verts.

Je lui aurais, quant à moi, très largement préféré le terme « environnementale », nettement plus approprié, car l'environnement embrasse, on le sait, une problématique plus large que l'écologie. Nous aurions pu en débattre longuement à l'occasion de cette proposition de loi.

« Planifier », c'est, à partir d'un constat, d'un état de situation, d'un inventaire, anticiper, prévoir afin d'éviter un écueil pour obtenir un résultat des réalisations en se dotant d'un calendrier pour mettre en oeuvre des actions au moyen de mesures, d'outils, et de budget définis.

À ce stade, si l'on applique le qualificatif « écologique » à cette planification, on obtient, d'une certaine façon, la définition du Grenelle de l'environnement. En effet, lors de l'étape du dialogue sociétal, préalable à la phase législative, un constat d'urgence fut dressé – constat de notre défaut à mettre en perspective notre développement pour en éviter les égarements. Ensuite se sont dégagées les mesures à reprendre dans les projets de lois éponymes.

Vous avez bien voulu retenir et faire nôtre, à l'unanimité, l'amendement que le groupe socialiste avait soutenu en ce sens à l'article 1er du Grenelle 1, consacrant cette urgence à agir et appelant à un programme d'actions, qui est le propre du Grenelle 2.

Tout ce mécanisme relève bien de ce qu'on pourrait qualifier de « planification écologique ». À ce stade, je suis un peu déçue que l'exposé des motifs de la proposition de loi dont nous avons aujourd'hui à connaître ne se soit pas directement réclamé du Grenelle de l'environnement. Je suis aussi un peu déçue que la commission ait rejeté un texte qui s'inscrivait si clairement dans cette volonté d'effort commun que l'on appelle Grenelle de l'environnement.

Les deux premiers titres de la proposition de loi précisent la notion de plan écologique de la nation. Les opposants au texte affirment y voir un doublon avec « l'engagement national pour l'environnement » du Grenelle 2, mais je pense que la nécessité d'agir de façon programmée et coordonnée, engageant l'État et, au-delà, les collectivités et les entreprises, bref l'ensemble de la nation, survivra à l'application du seul Grenelle 2. Pour atteindre les objectifs que nous visons, il faudra sûrement un Grenelle 3 et des Grenelle 4, 5, 6 …, en fait, un véritable plan environnemental de la nation.

Par le passé de nombreuses politiques de conservation et d'aménagement, qu'elles soient d'initiatives nationales ou européennes, comme Natura 2000, ont largement démontré la nécessité d'avoir une vision globale et cohérente des politiques territoriales. Chacun se souvient des difficultés à mettre en place Natura 2000, et chacun sait que cet outil ne suffit pas à protéger la faune et la flore menacées. À ce titre, les trames verte et bleue sont intéressantes. Elles sont complémentaires du réseau Natura 2000 et, au-delà, de l'ensemble des aires protégées. Reste à savoir si on leur donne une force juridique suffisante : c'est tout le débat de l'opposabilité des trames verte et bleue aux documents d'urbanisme. Une véritable planification écologique aurait probablement levé toutes ces interrogations.

Enfin, tout dispositif, aussi bon soit-il, s'apprécie également au regard des moyens budgétaires qui lui sont alloués ; c'est un élément nécessaire de la planification. En effet, qu'est-ce qu'un plan, sinon un engagement politique et financier dans la durée ?

Il y a quelques années, Philippe Duron et moi-même avions rédigé un rapport intitulé : « Du zonage au contrat ». Jusqu'à présent, les plans d'aménagement tels que nous les élaborons sont fondés sur le zonage. Il s'agit en effet de définir les usages incompatibles, de fixer les densités de construction par les coefficients d'occupation des sols, de concentrer l'urbanisation pour éviter de multiplier les équipements collectifs et préserver le plus possible les espaces naturels, agricoles et forestiers. Toutefois, bien souvent, les inventaires écologiques sont arbitraires et, surtout, très insuffisants. En outre, les conflits qu'entraîne la délimitation des zones sont nombreux et inévitables. Ainsi, la planification écologique de type américain a remis en cause la logique de zonage, pour s'orienter vers d'autres procédures.

Pourquoi ne pas profiter de l'examen de cette proposition de loi pour réfléchir, ici et ensemble, à ces différentes problématiques, au lieu de balayer ce texte d'un revers de main, comme l'a fait notamment la commission ?

Le titre III de la proposition de loi définit les outils et les structures de la planification, ainsi que les nouvelles missions de celles-ci. Il est ainsi proposé de renommer le Centre d'analyse stratégique « Commissariat à la planification écologique » et la Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires « Délégation interministérielle à l'aménagement écologique des territoires ». Au-delà de ma critique du terme « écologique », auquel je préfère celui d'« environnemental », ce texte aurait pu nous permettre de discuter de manière plus approfondie des moyens de ces structures et de leur rôle.

En dépit de ces réserves, le groupe SRC, sensible à l'idée d'une anticipation et d'une programmation des actions et des politiques publiques environnementales, est globalement favorable à l'esprit de la proposition de loi, à laquelle il reconnaît le mérite de prévoir l'après-Grenelle. Nous voterons donc pour ce texte, en espérant qu'il sera discuté dans cet hémicycle et que lui sera épargné le sort réservé aux propositions de loi examinées ce matin. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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