Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, compte tenu de la brièveté du temps qui m'est imparti, je bornerai mon intervention sur les crédits du programme 146 à trois remarques.
La première consiste à souligner le respect par le projet de loi de finances 2008 des dispositions de la loi de programmation militaire 2003-2008. Pour cette dernière annuité ont été inscrits 9,8 milliards d'euros d'autorisations d'engagement et 10,4 milliards d'euros de crédits de paiement.
Je crois pouvoir exprimer, au nom de l'ensemble de mes collègues, la satisfaction de constater qu'une loi de programmation militaire a été respectée pendant l'intégralité de sa durée. Au cours de cette période de cinq ans, les tentations ont été fortes de revenir aux pratiques antérieures, qui voulaient qu'une loi de programmation militaire ne soit valable que pour sa première annuité et qu'il importait peu par la suite d'en respecter les termes. Or, dans un souci de cohérence, par une volonté unanimement partagée de modernisation de notre outil militaire, l'effort de la nation en matière d'équipements militaires a été constant, important et productif. Je voudrais vous en féliciter, monsieur le ministre.
En 2008, les principales commandes d'équipement concernent le VBCI – 116 véhicules –, le Rafale – 8 avions –, le NH 90 – 22 appareils. En termes de livraison, nos armées attendent notamment 41 VBCI, 14 avions Rafale et une frégate Horizon. On le constate, d'importants programmes arrivent à terme, malgré de nombreuses difficultés que j'évoquerai ultérieurement.
Je ferai trois observations. En premier lieu, les crédits destinés à la dissuasion représentent 18,4 % du programme. C'est beaucoup, mais c'est la traduction de la volonté constante de la France de disposer d'un arsenal autonome de dissuasion nucléaire. En juillet dernier, dans son important discours de l'Île Longue, le Président de la République a réaffirmé la nécessité de poursuivre l'effort nucléaire.
Ma deuxième observation concerne le second porte-avions. S'il appartient aux plus hautes autorités de l'État de procéder aux décisions majeures sur ce programme, je souhaite, monsieur le ministre, que le Parlement puisse être associé à la réflexion menée par le Gouvernement sur ce dossier.
Enfin, au sujet de l'Europe de la défense, des programmes menés en collaboration avec des alliés européens – britanniques, allemands, italiens ou espagnols – sont en cours de développement, voire arrivent à terme. Ils ont tous rencontré beaucoup de difficultés, notamment en raison des divergences stratégiques et tactiques entre les différentes armées concernées. Aujourd'hui, nous sommes arrivés à un point crucial, où les futures collaborations vont toucher des fonctions éminemment stratégiques – je pense principalement à l'espace.
L'Europe et ses pays membres sont-ils prêts à agir en partenariat sur ces fonctions stratégiques, impliquant notamment le partage d'informations sensibles touchant à la souveraineté ? La commission de la défense et des forces armées de l'Assemblée nationale doit apporter son expertise et son regard politique sur cette question majeure.
Ma deuxième remarque sur les crédits pour 2008 vise à attirer l'attention sur le fait que, au-delà de la satisfaction de voir la loi de programmation militaire respectée, des difficultés et de lourdes interrogations subsistent.
Le programme A400M m'inquiète. À l'automne dernier, puis au printemps, j'ai publiquement exprimé mes inquiétudes face au silence d'EADS sur les retards de ce programme. Aujourd'hui, on nous annonce des délais supplémentaires pour livrer le premier appareil et des surcoûts importants. Est-il vraiment certain qu'il n'y aura pas de nouveaux dérapages ? Pour ma part, je reste très inquiet et vous demande, monsieur le ministre, d'être extrêmement ferme vis-à-vis de l'industriel sur ce dossier.
Autre point d'inquiétude souligné par de nombreux collègues, les drones. Alors que la France affichait une volonté forte de disposer de ces équipements indispensables sur les plans tactique et stratégique, des choix industriels hasardeux et des atermoiements militaires nous ont fait prendre un retard aujourd'hui quasi insurmontable. Nous avions de l'avance en 2000 en matière de drones ; nous voici aujourd'hui à la traîne. Il est donc temps de réagir avec force sur cette question.
Troisième et ultime remarque : plusieurs exercices sont actuellement en cours et auront une incidence sur les équipements de nos armées dans les années à venir. Le Livre blanc, la revue de programmes et la RGPP redessineront le cadre décisionnel, le suivi et la nature des prochains programmes d'équipements militaires. Les places et responsabilités du chef d'état-major des armées, des états-majors d'armées et de la DGA devront être précisées. Le suivi et le contrôle des industriels devront être resserrés.
Le Parlement ne doit pas être absent de cette réforme. Certes, des députés sont associés à la rédaction du Livre blanc, et c'est une très bonne chose. Mais le rôle du Parlement doit se prolonger au-delà. Le président Teissier a mis en place sous la précédente législature une mission d'information sur le contrôle de l'exécution des crédits de la défense. Cette excellente initiative a contribué au respect des termes de la loi de programmation militaire.
En matière d'équipements, il conviendrait de faire de même. La mise en place d'une mission d'information permanente sur le suivi des programmes d'armement est un impératif démocratique.