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Intervention de François de Rugy

Réunion du 1er décembre 2009 à 21h30
Simplification et amélioration de la qualité du droit — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy :

C'est d'abord le fait que ni en commission, ni en séance, ni au Sénat, ce texte n'a été discuté, ne serait-ce qu'a minima, même pour la forme ! Nous en sommes arrivés à ne même plus savoir ce que nous votons et à nous en remettre aux fiches qui nous sont distribuées par nos groupes respectifs nous indiquant comment il faut voter : c'est grave, et cela en dit long sur la place que tient le Parlement dans nos institutions.

Pas un mot, pas un seul mot ne fut prononcé pour discuter le fameux article 124 de loi du 12 mai 2009 déjà dite de simplification du droit, article qui comporte 57 dispositions législatives différentes, dont celle qui a fait scandale à propos de la scientologie : la trente-troisième, perdue au milieu de toutes les autres !

Il ne s'agit pas de tromper nos concitoyens en parlant abusivement de simplification du droit – d'autres collègues l'ont dit avant moi, il s'agit en fait de production législative, de voiture-balai législative. Le seul intérêt d'un tel texte serait la clarification, enjeu fondamental pour le bon fonctionnement de nos institutions et de notre pays.

Je prendrai un exemple récent auquel vous auriez pu vous atteler, et faire oeuvre utile, monsieur Warsmann : celui de la réforme de la taxe professionnelle. Soixante-dix pages pour un seul article du projet de loi de finances ! Personne ne s'y retrouve, tout le monde le reconnaît. Voilà un exemple de complexité de la loi. Ce n'est pas une polémique politicienne : les élus de tous bords, à commencer par les élus locaux, ressentent très douloureusement la complexité de la réforme de la taxe professionnelle.

Mais le problème tient surtout à difficulté de compréhension chez celles et ceux à qui elle sera appliquée, à commencer par les entrepreneurs assujettis aux différentes taxes qui remplaceront la taxe professionnelle. Leur comptable ou leur expert-comptable auront des problèmes pour les aider ; le plus grave, c'est que ces entrepreneurs pourront se retrouver hors la loi malgré eux, simplement à cause d'une législation trop complexe. Sans parler des dépenses inutiles que cette législation va entraîner pour nos entreprises – argument auquel vous devriez être sensibles, mes chers collègues de la majorité –, avec tous les frais d'experts divers et variés. Évidemment, les experts, eux, feront leur miel de cette complexité. Au surplus, cette réforme suscitera une difficulté d'application pour les fonctionnaires des impôts.

Le résultat de tout cela, on le connaît tous par avance : encore plus de contentieux devant les tribunaux. Faisons-nous vraiment oeuvre utile si nous votons des lois qui suscitent des contentieux supplémentaires ? C'est exactement l'inverse du but soi-disant recherché par ce texte de simplification du droit.

Dès lors, à quoi sert-il d'afficher une volonté de simplification quand elle n'est pas suivie d'effet et que l'on vote sans cesse des projets de loi toujours plus complexes ? Pour parvenir à une clarification du droit, il faudrait procéder à un travail constant, en ne mélangeant pas les thèmes : si on veut clarifier, il faut commencer par traiter les thèmes les uns après les autres. À cet effet, nous avons déposé des amendements et, Jean-Michel Clément l'a déjà évoqué, il y a des amendements du groupe SRC que nous soutiendrons – je pense, par exemple, à celui qui propose la suppression du délit d'offense au Président de la République. Mais j'entends d'ici vos protestations, monsieur le rapporteur, monsieur le président Warsmann : vous allez nous dire que ces amendements n'ont rien à voir avec cette proposition de loi et qu'il faudrait les renvoyer à un autre débat. Nous avons déjà entendu cela lors de l'examen du précédent texte de simplification du droit. Mais si vous étiez sincères, vous les accepteriez.

Pour toutes les raisons que j'ai développées devant vous, mes chers collègues, à savoir le non-respect de la procédure, la complexité – ce qui est un comble pour un texte sur la simplification du droit – et le mélange des genres, je vous invite à voter la motion de renvoi en commission. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

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