Où est-il, le temps, pas si lointain, où le président de la commission des lois vantait les mérites des études d'impact ? En choisissant le véhicule d'une proposition de loi, la majorité a soustrait le Gouvernement à l'obligation de réaliser ces études qui auraient été éminemment nécessaires. Mais il fallait faire vite, compte tenu de l'encombrement de l'ordre du jour de notre assemblée…
Votre méthode est encore critiquable par le fait que nombre de commissions permanentes, qui auraient dû être consultées pour avis, ne l'ont pas été. Le président de la commission des finances s'en étant ému, sa commission a été saisie pour avis sur trois articles. Mais on ne peut en dire autant de la commission des affaires sociales ou de celle du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Le président Warsmann montre un appétit sans limite, puisqu'il engloutit dans le domaine de compétence de la commission des lois les questions les plus diverses, des fuites d'eau au droit de préemption urbain en passant par les délégations de compétence des maires et le mariage posthume…
Votre méthode est encore en défaut lorsque que l'auteur et le rapporteur de la proposition en viennent à appuyer en commission des amendements du Gouvernement visant à obtenir pas moins de six habilitations à légiférer par voie d'ordonnance sur des sujets divers et variés. Est-ce là votre conception de la simplification du droit ?
Que dire d'une démarche qui se traduit par l'abrogation en cascade une série de dispositions législatives au motif – tenez-vous bien – que le pouvoir exécutif a « omis d'édicter les règlements d'application » ? C'est la place de la loi dans la hiérarchie des normes qui s'en trouve dégradée. Et que dire du sort réservé à la volonté du législateur, quand le véhicule législatif d'amélioration de la qualité du droit tire un trait de plume sur les lois votées par notre propre assemblée ? En réalité, votre proposition de loi ne vise pas à améliorer la qualité du droit : elle fait simplement office de voiture-balai…
Que dire d'un texte de simplification qui comporte des dispositions issues d'un rapport parlementaire émanant de notre propre commission, et ayant abouti de surcroît à une proposition de loi de nos deux collègues appartenant respectivement à la majorité et à l'opposition, Jacques-Alain Bénisti et Delphine Batho ? La commission des lois aurait dû s'abstenir d'une telle pratique sur des sujets aussi essentiels que les libertés publiques et la sécurité, et légiférer au contraire à partir d'un vrai travail parlementaire, comme celui réalisé par nos collègues.
Que dire enfin de votre démarche, lorsqu'on sait que, pour la première fois depuis la révision constitutionnelle de 2008, le Conseil d'État a été saisi pour avis sur cette proposition et que nous attendons toujours la communication de cet avis, même si nous avons pu en lire quelques bribes dans le rapport ?
Cela mérite d'être rappelé aux citoyens qui suivent nos débats : il aura fallu que le président Jean-Marc Ayrault demande en novembre au président de l'Assemblée de saisir le Conseil d'État, pour apprendre que celui-ci avait déjà été saisi en août et qu'il avait rendu son avis au mois d'octobre ! Bien entendu, M. Warsmann niera cette évidence en prétextant que des extraits de l'avis en ont été publiés dans le pré-rapport. Mais pourquoi ne pas nous avoir communiqué dans son ensemble ? Était-il si négatif que vous redoutiez de le porter à notre connaissance ?