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Intervention de Jean-Michel Clément

Réunion du 1er décembre 2009 à 21h30
Simplification et amélioration de la qualité du droit — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Michel Clément :

On peut légitimement s'interroger sur la pertinence d'une politique qui participe elle-même de l'inflation législative. Vos « lois de simplification » ne sont-elles pas le symptôme même de la crise de la loi que j'ai dénoncée ?

La simplification a été qualifiée « de dernier credo des crédules » par le professeur Pierre-Yves Monjal ou encore « d'illusion dangereuse » par le professeur Jean-Marie Pontier. Le Conseil d'État porte lui-même un regard désabusé sur votre politique en la matière. Dans son rapport de 2006 consacré à la sécurité juridique, il regrette « le déploiement d'efforts considérables pour des résultats parfois modestes, une tendance à multiplier les mesures formelles au lieu d'entreprendre des réformes de fond, un manque de constance dans la mise en oeuvre des orientations ». Et de relever que « l'effort de simplification ne conduit pas, dans l'immense majorité des cas, à une réduction du nombre d'articles ou de dispositions applicables », mais « entraîne au contraire un alourdissement de certains textes, ce qui ne peut que rendre plus incertain l'apport concret pour les citoyens de telles mesures ». Ces critiques, monsieur le président Warsmann, vous ne pouvez les ignorer puisqu'elles figurent dans votre rapport de 2008 sur la simplification du droit.

Loin de répondre à ces critiques fondées, cette nouvelle proposition de loi illustre la dérive de la politique de simplification du droit. Ce texte fourre-tout mérite-t-il son titre, alors qu'il comporte plus de cent cinquante articles modifiant près de cinquante-six lois, cinq ordonnances, quatre décrets et quarante-huit codes ? La litanie aurait de quoi lasser l'auditoire : code de l'artisanat, code de l'aviation civile, code des assurances, code civil, code de la construction et de l'habitation, code de la consommation, code de commerce, code de la défense, code des douanes, code de l'éducation, code de l'expropriation pour cause d'utilité publique – j'y reviendrai –, code de justice administrative, code de justice militaire, code général des collectivités territoriales, code général des impôts – peut-être plus surprenant –, code des marchés publics, code des débits de boissons et des mesures contre l'alcoolisme, code monétaire et financier, code minier, code de la mutualité, code du patrimoine, code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre, code pénal, code de procédure pénale, code des ports maritimes, code de la recherche, code de la route, code rural, code de la santé publique, et j'en passe !

Chacun de ces sujets appelle sans doute une intervention du législateur, mais celui-ci peut-il les embrasser tous dans une seule et même proposition de loi ? En procédant de la sorte, vous exposez nos concitoyens à l'insécurité juridique.

Votre politique de simplification du droit s'inscrit dans le cercle vicieux de la dégradation de la qualité de la norme, dégradation évidemment liée à la manière de légiférer. Au reste, la proposition de loi est le comble de la simplification, puisqu'elle simplifie les précédentes lois de simplification du 9 décembre 2004 et du 12 mai 2009. Dès lors, une question se pose, monsieur le président de la commission : combien faudra-t-il de lois de simplification pour simplifier celle que vous nous proposez aujourd'hui ?

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