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Intervention de Jean-Pierre Schosteck

Réunion du 24 novembre 2009 à 15h00
Application de l'article 61-1 de la constitution — Discussion en deuxième lecture d'un projet de loi organique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Schosteck, suppléant M :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, le projet de loi organique relatif à l'application de l'article 61-1 de la Constitution, qui avait été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 14 septembre 2009, nous revient aujourd'hui du Sénat qui l'a adopté le 13 octobre dernier.

Nous avons, en première lecture, effectué un travail d'analyse approfondi et, dans un large consensus, apporté au texte initial un certain nombre de compléments, avec le souci constant de rendre le dispositif de la question de constitutionnalité plus opérationnel.

L'Assemblée nationale a souhaité affirmer clairement qu'une question de constitutionnalité doit être examinée par les juridictions avant la question de conformité d'une disposition législative aux engagements internationaux conclus par la France. Elle a pour cela réécrit la disposition relative à la priorité d'examen, et également rebaptisé la question « question prioritaire de constitutionnalité ».

L'Assemblée nationale a également modifié les critères devant être utilisés par les juridictions pour transmettre aux juridictions suprêmes, puis pour renvoyer au Conseil constitutionnel, une question de constitutionnalité, afin de permettre à cette question de porter sur toute disposition législative applicable au litige.

L'Assemblée nationale s'est penchée sur les délais d'examen des questions de constitutionnalité par les juridictions de chacun des deux ordres de juridiction puis par les juridictions suprêmes. Afin d'éviter toute utilisation dilatoire de cette nouvelle procédure, il a été retenu un délai maximal d'examen de deux mois devant les juridictions saisies, et de trois mois devant le Conseil d'État et la Cour de cassation. Pour rendre ces délais pleinement opérationnels, l'Assemblée nationale a également introduit une disposition permettant une transmission de la question à défaut de réponse dans les délais par la juridiction.

L'Assemblée nationale a également étendu le dispositif de la question prioritaire de constitutionnalité aux lois du pays de la Nouvelle-Calédonie.

Enfin, concernant l'examen de la question de constitutionnalité par le Conseil constitutionnel, l'Assemblée nationale a souhaité restreindre aux seuls Président de la République et Premier ministre la faculté de transmettre au Conseil constitutionnel des observations sur une question dont il serait saisi. L'Assemblée a également prévu qu'une question renvoyée au Conseil constitutionnel devrait en toute hypothèse être examinée par lui, quel que soit le sort de l'instance à l'occasion de laquelle la question a été soulevée.

Le Sénat a, dans une très large mesure, approuvé les choix faits en première lecture par l'Assemblée nationale et apporté les modification suivantes : il a prévu une motivation de toutes les décisions des juridictions relatives à la transmission ou au renvoi des questions prioritaires de constitutionnalité ; il a étendu aux juridictions financières les dispositions relatives à l'examen des questions prioritaires de constitutionnalité ; il a rétabli les observations pouvant être transmises au Conseil constitutionnel par les présidents des deux assemblées parlementaires ; il a enfin supprimé l'existence d'un délai d'examen des questions par les juridictions et la disposition relative à la transmission de la question à la juridiction suprême à défaut d'examen dans le délai prévu.

Si les premières de ces modifications confirment les orientations retenues par l'Assemblée nationale, en revanche, la dernière modification manifeste une réelle divergence. En commission des lois, le président Jean-Luc Warsmann a exprimé ses regrets que le Sénat ait supprimé l'exigence d'un délai maximal d'examen des questions prioritaires de constitutionnalité par les juridictions. L'argument selon lequel l'intérêt du délai pour le justiciable ne serait que relatif, dans la mesure où la partie pourrait à nouveau soulever la question de constitutionnalité en appel ou en cassation, n'est pas très robuste, car il est toujours dans l'intérêt du justiciable de savoir le plus rapidement possible si sa question est recevable et doit prospérer, ou si elle est au contraire infondée. Et la crainte que le juge du fond ne laisse courir le délai afin de laisser à la cour suprême le soin de statuer révèle un pessimisme à l'égard du travail des magistrats qui peut sembler excessif.

Le délai aurait pu être conservé devant les juridictions de l'un ou l'autre ordre, et ce d'autant plus que le Sénat a maintenu le délai de trois mois imposé dans tous les cas aux juridictions suprêmes, et la transmission automatique au Conseil constitutionnel de la question qui n'aurait pas été examinée dans ce délai.

À défaut d'un rétablissement du texte adopté en première lecture par l'Assemblée nationale, qui aurait pour effet de prolonger la navette et de retarder l'entrée en vigueur de ce nouveau droit constitutionnel, le président Warsmann, et avec lui la commission des lois, a exprimé le souhait que le Gouvernement renseigne, par des indicateurs précis et détaillés, le temps passé par les différentes juridictions à l'examen des questions de constitutionnalité qui seront soulevées. Comme le Gouvernement s'est engagé à dresser un bilan de l'application de la question prioritaire de constitutionnalité pour ses premières années d'application, ces indicateurs, qui devront figurer dans ce bilan, permettront au législateur, le cas échéant, d'adapter le dispositif actuel.

La commission vous propose donc d'adopter sans modification le présent projet de loi organique, ce qui devrait ainsi permettre aux justiciables de pouvoir exercer ce nouveau droit trois mois après la promulgation de la loi, c'est-à-dire dès le printemps 2010. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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