Cela fait l'objet d'un accord intergouvernemental publié au Journal officiel.
L'accord qui nous est soumis garantit également que les activités bilatérales ne seront pas proliférantes. Il garantit, surtout, l'approvisionnement des centrales nucléaires. C'est ce à quoi l'Inde est particulièrement attachée parce que, aujourd'hui, ses centrales nucléaires tournent à 50 % de leur capacité, faute de la disponibilité de la matière première qui est le combustible. La France s'engage à fournir du combustible et à participer à une initiative de banque commune de combustible, ce qui répond à l'idée de non-prolifération.
J'aimerais vous donner également quelques éléments sur la situation énergétique de l'Inde. Ce pays importe 80 % de son pétrole. Ses besoins énergétiques, en 2006, étaient de 566 millions de TEP – ceux de la France sont de 274 millions de TEP. Ses émissions de gaz carbonique se sont élevées, en 2006, à 1 270 millions de tonnes, contre 377 dans notre pays. Son émission par habitant est de 1,1 tonne, contre 6 tonnes en France.
La production électrique de l'Inde était de 740 térawattheures en 2006, contre 569 térawattheures en France. Le secrétaire d'État l'a dit, dix-sept centrales sont en fonctionnement en Inde, d'une puissance d'environ 4 000 mégawatts. Six sont en construction. Elles sont de type bouillant, PWR. Je vous signale, à titre de comparaison, que la puissance installée en France est de quelque 63 000 mégawatts.
J'en viens au contexte. L'Inde dispose d'un arsenal militaire nucléaire, et elle n'a pas signé le traité de non-prolifération. C'est la raison pour laquelle elle a été tenue à l'écart de la coopération internationale. Néanmoins, la coopération civile est prévue par le TNP de 1968. D'ailleurs, la France ne l'a ratifié que récemment, ce qui ne l'a pas empêché d'avoir des coopérations dans le domaine du nucléaire civil.
Le 10 septembre 2008, les quarante-sept États membres du groupe des fournisseurs nucléaires, instance informelle qui fixe les règles en matière d'exportation de produits nucléaires, a décidé, à l'unanimité, de lever les restrictions concernant le commerce nucléaire avec l'Inde. Quels ont été les fondements de cette décision ?
D'abord, les engagements de l'Inde souscrits au titre de la non-prolifération, et la réaffirmation de son moratoire sur les essais nucléaires.
Ensuite, l'Inde soumet déjà dix de ses dix-sept réacteurs existants aux inspections de l'AIEA. Outre ces dernières, d'ailleurs, des caméras surveillent vingt-quatre heures sur vingt-quatre tous les mouvements. Les bilans de transferts de matières radioactives – les stocks et les flux – sont également portés à la connaissance de l'AIEA.
Enfin, toute nouvelle infrastructure sera soumise au contrôle de l'AIEA.
Les besoins énergétiques futurs de l'Inde sont considérables. Aujourd'hui, la production électrique est essentiellement assurée par le charbon, avec les conséquences environnementales que l'on connaît. C'est sûrement l'une des raisons pour lesquelles, alors que ses besoins de production vont être multipliés par trois d'ici à 2030, l'Inde veut développer de nouvelles capacités électronucléaires, et peut-être multiplier par dix sa puissance actuelle, au moyen de vingt à trente réacteurs supplémentaires dans les années à venir. Ses besoins énergétiques devraient passer à 1 106 millions de TEP en 2030, contre 760 millions en 2015.
Par ailleurs, il est prévu que l'Inde rejettera, en 2030, 2 209 millions de tonnes de CO2. C'est, du reste, une des raisons pour lesquelles ce pays refuse tout accord contraignant dans le cadre du sommet de Copenhague.
J'en viens aux coopérations politiques. Depuis le 10 septembre 2008, l'Inde a signé sept accords de coopération nucléaire. Elle a ainsi conclu des partenariats généraux incluant la construction de centrales avec la Russie et les États-Unis et des accords sur les conditions de fourniture de matières premières pour ses centrales avec l'Argentine, le Kazakhstan, la Namibie et la Mongolie. La coopération politique s'accompagne de coopérations commerciales. En effet, toutes les grandes entreprises mondiales – russes, américaines, canadiennes, coréennes – ont obtenu des marchés, soit pour des centrales, soit pour la fourniture de combustibles. Comme M. le secrétaire d'État l'a rappelé, Areva a signé ce que l'on pourrait appeler un mémorandum de compréhension susceptible de conduire à la construction de deux EPR dans les années à venir. La France a donc tout intérêt à approfondir son partenariat avec l'Inde qui sera, à l'avenir, un acteur majeur en matière d'énergie nucléaire.
En conclusion, l'accord du 30 septembre 2008 a été rendu possible par la décision unanime des quarante-sept pays du groupe des fournisseurs nucléaires d'autoriser le commerce avec l'Inde. Celle-ci a noué avec les puissances nucléaires des partenariats qui ont eu des retombées commerciales immédiates. Or, notre industrie nucléaire est l'une des premières du monde ; je rappelle en effet qu'Areva est le premier fournisseur de services nucléaires aux États-Unis. C'est donc une opportunité pour le savoir-faire français. Au demeurant, plus les coopérations existeront, plus les relations entre les autorités de sûreté et les scientifiques se développeront, et plus l'Inde tendra à se rapprocher des standards internationaux de sûreté nucléaire.
Cet accord offre des garanties en matière de non-prolifération, compte tenu des engagements que l'Inde a pris vis-à-vis de l'Agence internationale de l'énergie atomique. A n'en pas douter, ce pays a la capacité et les infrastructures scientifiques nécessaires pour faire face au développement de cette énergie. C'est la raison pour laquelle votre commission des affaires étrangères vous recommande d'adopter ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)