Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, j'interviendrai exclusivement sur la mission « Engagements financiers de l'État », qui se caractérise par un alourdissement considérable de la charge de la dette de l'État en 2008. Celle-ci augmente d'au moins 4 milliards par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale et ce poste de dépense restera, hors remboursements et dégrèvements, le deuxième du budget de l'État.
Certes, l'inflation a atteint un niveau exceptionnel en 2008, ce qui n'est pas sans effet sur l'augmentation de la charge de la dette, mais le taux d'inflation prévu en loi de finances initiale avait été sous-évalué : au lieu de 1,6 %, il sera proche de 3 %. Par ailleurs, l'inflation ne peut être tenue pour seule responsable de l'augmentation de la charge de la dette. Le dépassement des crédits votés en loi de finances initiale pour 2008 atteint 1,6 milliard, ce qui n'est imputable qu'à la gestion du Gouvernement.
J'ai noté, monsieur le secrétaire d'État, que, par un doux euphémisme, vous aviez qualifié de « difficile » la prévision de la charge de la dette. Pourtant, malgré ses mauvais résultats et un contexte économique que nous connaissons tous, le Gouvernement soutient que cette charge diminuera légèrement en 2009. Une telle affirmation n'est pas crédible au vu du fort ralentissement économique attendu. En outre, les recettes fiscales diminuant en conséquence, je ne vois pas comment l'accumulation des déficits passés, s'ajoutant à ceux qui s'annoncent, pourrait limiter la progression de la charge de la dette en 2009.
Pour la seule année 2008, vous estimez à 7,7 milliards la dégradation du déficit budgétaire. Or je rappelle qu'une aggravation d'un milliard provoque un alourdissement de la charge de la dette de l'ordre de 50 millions. Déficit budgétaire, dérapage de la charge de la dette : convenez, monsieur le secrétaire d'État, que le solde n'est vraiment pas positif !
À l'issue de la première partie de la loi de finances pour 2009, le besoin de financement de l'État augmente de 16 milliards par rapport à 2008, et l'effet « boule de neige » de l'endettement est bien loin de s'arrêter. Il entraînera un accroissement des financements à court terme, qui sont bien plus exposés à l'évolution des taux d'intérêts. Vous êtes dans l'incapacité totale de stopper cette dynamique.
Selon vos estimations, la dette va croître, en 2008, de 1,4 point de PIB. Un tel taux n'avait plus été atteint depuis 2005. Ainsi, les effets de la crise économique se feront sentir non seulement sur les conditions de financement de l'État, mais aussi sur les intérêts de sa dette.
Par ailleurs, faisons un peu de prospective : l'aggravation des charges d'intérêts sera nettement plus forte lors du futur rétablissement conjoncturel, puisque les investisseurs préféreront à nouveau les actions et que les taux des emprunts d'État devront augmenter pour rester attractifs.
Vos évaluations reposent sur l'hypothèse d'un net redressement des finances publiques à partir de 2010, dû à un redémarrage soudain de la croissance économique, qui était jusqu'alors très limitée. Elles supposent également que les exécutions budgétaires de 2008 et de 2009 seront tenues. Quand on sait ce qu'il en est advenu les années précédentes et que l'on connaît l'incertitude qui pèse sur les prévisions pour 2009, on ne peut qu'être sceptique sur prévisions aussi peu réalistes. Mais qui peut encore les croire, puisque, depuis le début de la législature, on a pu constater leur incohérence totale, au regard de la situation économique ? Le volet « recettes » du projet de loi de finances n'est pas fait pour nous rassurer. Nous en reparlerons lundi.
Le ralentissement économique que nous connaissons est sévère et personne ne peut aujourd'hui affirmer qu'il prendra fin en 2010, entraînant alors un fort redémarrage de la croissance. Personne, monsieur le secrétaire d'État, pas même les économistes, et encore moins vous-même !
La gravité de la crise a contraint l'État à venir en aide au secteur bancaire. Les éventuelles défaillances d'établissements bancaires provoqueront des dépenses budgétaires qui s'imputeront sur le programme « Appels en garantie de l'État ». Il n'est d'ailleurs pas normal que, dans ce programme, vous utilisiez le prélèvement de l'État sur la trésorerie de la COFACE comme une variable d'ajustement budgétaire.
Vous relevez à 3,1 milliards d'euros le prélèvement prévu initialement à 2,9 milliards en 2008. Cette manoeuvre budgétaire, qui n'a d'autre but que de limiter la hausse du déficit budgétaire pour 2008, a d'ailleurs été dénoncée par Eurostat. Elle est d'autant plus dangereuse que la détérioration récente du contexte économique laisse craindre une aggravation de la situation financière de la COFACE : avec la crise, les défauts de paiements des entreprises risquent de se multiplier, et cet organisme de crédit sera d'autant plus sollicité.
Dans le projet annuel de performances pour 2009, vous reconduisez, pour l'essentiel, les objectifs des années passées. Mais il est regrettable qu'un certain nombre de remarques judicieuses de notre rapporteur spécial Dominique Baert n'aient pas été prises en compte. C'est le cas, notamment, de l'ajout d'un indicateur de performance permettant de suivre le taux d'annonce effectif des établissements publics nationaux qui dépensent plus d'un million d'euros. Dans le projet annuel de performances pour 2009, cet indicateur n'est toujours pas renseigné. Par ailleurs, il serait utile d'instaurer un indicateur qui rende compte au Parlement de la pertinence de l'arbitrage entre la réduction de la durée de vie de la dette et l'augmentation de la variabilité de sa charge.