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Intervention de Georges Colombier

Réunion du 19 novembre 2009 à 9h30
Droit de finir sa vie dans la dignité — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorges Colombier :

Je ne le pense pas. Faire la loi à partir d'une émotion collective, même justifiée, née d'une situation extraordinaire, ne me paraît pas devoir relever du législateur.

Il nous faut bien mesurer toutes les conséquences du texte que nous examinons. Contrairement à ce qu'indique l'exposé des motifs, ce texte ne propose pas simplement de franchir un pas supplémentaire dans l'accompagnement, iI remet tout bonnement en cause la philosophie de la loi de 2005 en instaurant un véritable droit à la mort, condamné par la Cour européenne des droits de l'homme. Si cette proposition de loi soulève une vraie question, celle de l'accompagnement de la fin de vie, elle y apporte, à mon sens, une mauvaise réponse en proposant ni plus ni moins une légalisation de l'euthanasie dans notre pays. La porte qui serait ainsi ouverte me semble dangereuse sur le plan éthique, moral et philosophique.

Les dispositions de la loi du 22 avril 2005, complétées par le décret en Conseil d'État sur la sédation d'accompagnement, permettent déjà de prendre en compte l'ensemble des situations de fin de vie en proscrivant l'obstination déraisonnable, en autorisant l'arrêt de traitement, y compris au risque de raccourcir la vie, et en mettant en place une sédation d'accompagnement encadrée. Cette loi, adoptée, je le rappelle, à l'unanimité à l'Assemblée nationale, a permis de trouver un point d'équilibre entre les différentes sensibilités sur ce sujet. Demain, l'autorisation de l'assistance médicalisée pour mourir dans la dignité permettrait-elle au malade d'échapper à l'acharnement thérapeutique et de ne pas subir des souffrances intolérables ? Serait-ce la garantie d'une mort plus douce ? Je ne le pense pas. Aujourd'hui, le cadre législatif permet déjà de refuser à la fois l'acharnement thérapeutique et l'euthanasie, et de continuer à être soigné avec attention ; aujourd'hui, la médecine permet de prodiguer des soins anti-douleur de plus en plus adaptés, que l'on peut régulièrement réajuster. Au passage, je rappelle que des efforts réels en matière de soins palliatifs sont consentis. Le Président de la République a annoncé, le 13 juin 2008, la mise en place d'un programme de développement des soins palliatifs de 2008 à 2012, programme qui a pour ambition de doubler le nombre de personnes en bénéficiant : 230 millions d'euros supplémentaires seront consacrés aux soins palliatifs entre 2008 et 2012, soit environ 46 millions d'euros par an.

Enfin, je ne suis pas convaincu que l'euthanasie soit la certitude d'une mort douce car administrer une injection létale à un patient peut entraîner une mort brutale, parfois très pénible. Ce point nous interpelle sur la responsabilité des médecins : quid du serment d'Hippocrate et du code de déontologie médicale qui interdit à un médecin de provoquer délibérément la mort ?

Vous le voyez, mes chers collègues, le texte qui nous est proposé pose plus de questions qu'il n'en résout. Le sujet, cela a été rappelé en commission, est délicat et nous interpelle au plus profond de nous-mêmes. Je suis absolument d'accord pour le refus de l'acharnement thérapeutique, pour l'amélioration et le développement des soins palliatifs, pour assurer la dignité jusqu'à la mort dans le respect des volontés du malade dûment informé. À cet égard, la mission d'évaluation de la loi du 22 avril 2005, conduite par notre collègue Jean Leonetti, formule une série de propositions pour améliorer encore l'accompagnement des personnes en fin de vie. Je m'en réjouis. Ces recommandations, dont certaines sont déjà en cours de mise en oeuvre, tel le congé d'accompagnement de la fin de vie – adopté à l'unanimité par l'Assemblée nationale le 17 février dernier –, permettront encore d'améliorer l'accompagnement de la fin de vie, en particulier dans les situations les plus complexes.

L'instauration d'une aide active à mourir, je le répète, me paraît dangereuse. On croit savoir où cela commence, on ne sait pas, par contre, où cela doit s'arrêter ! Aussi, vous le comprendrez, je suis hostile à l'aide active à mourir et ne voterai pas le texte qui nous est proposé. La tonalité de nos débats démontre, comme je l'ai déjà dit en commission, tout à la fois la réalité de cette question de société et la nécessité du respect des opinions de chacun pour la réalisation de tout progrès dans ce domaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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