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Intervention de Michel Vaxès

Réunion du 18 novembre 2009 à 15h00
Réduction du risque de récidive criminelle — Article 5 ter

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Vaxès :

Je m'interroge sur la faisabilité de cet article 5 ter, qui prévoit que l'injonction de soins pourra concerner des médicaments entraînant une diminution de la libido. Les conditions d'utilisation du traitement, telles que vous les prévoyez, posent plusieurs problèmes, et je souhaiterais que nous obtenions quelques informations avant d'entamer l'examen de l'article.

Quels sont les effets secondaires de ces traitements ? Il semble qu'ils soient réels et méritent la plus grande attention médicale. Certaines molécules utilisées peuvent provoquer en un ou deux ans une déminéralisation osseuse. L'une d'elles est contre-indiquée pour les personnes atteintes d'une psychose ou souffrant d'épilepsie. Enfin, elles peuvent entraîner des effets secondaires non négligeables, ce qui signifie que leur prescription doit être accompagnée d'un suivi médical rigoureux. L'utilisation de ces médicaments ne peut donc être envisagée dans tous les cas et sur le long terme.

Je m'inquiète en outre des amendements proposant que le traitement puisse être ordonné sans l'accord de l'intéressé. Si l'injonction de soins vise à entraîner une diminution de la libido, la question du consentement doit être posée. Je citerai à ce sujet les propos du président de la Cour de cassation : « Pour une majorité de thérapeutes, la reconnaissance par le sujet des faits qui lui sont reprochés, même si elle n'est que partielle ou implicite, est une condition préalable à leur intervention. Celle-ci ne peut, en outre, être envisagée que si le délinquant manifeste son accord pour en bénéficier. On peut toutefois douter de la sincérité d'un consentement manifesté en échange d'une libération ou d'un maintien en liberté, et donc de l'efficacité ultérieure du traitement. » En l'espèce, comment ne pas douter de la sincérité du consentement ?

Quant à M. Garraud, qui s'est plaint hier que je ne citais que M. Lamanda, il observe : « Les modifications effectuées permettent d'indiquer dans le code de procédure pénale, de façon explicite et sans la moindre ambiguïté, les mesures auxquelles s'expose la personne qui refuse soit de commencer, soit de poursuivre le traitement proposé :

- si elle est détenue, la personne s'expose au retrait de son crédit de réduction de peine, ou à l'interdiction de bénéficier de réduction supplémentaire de peine ;

- si elle exécute sa peine en milieu ouvert [...], la personne encourra la révocation ou le retrait de la mesure, et donc une incarcération ;

- si elle est sous surveillance judiciaire, la personne pourra être réincarcérée pour exécution de son reliquat de peine ;

- si elle est sous surveillance de sûreté, la personne pourra faire l'objet d'un placement en rétention de sûreté, conformément aux dispositions et selon la procédure de l'article 706-53-19 du code de procédure pénale. »

Pensez-vous que la personne acceptera de suivre ce traitement parce qu'elle est convaincue de son utilité et qu'elle souhaite sincèrement en bénéficier, ou simplement parce qu'elle voudra échapper à la prison ?

D'autre part, n'y a-t-il pas une contradiction entre les risques médicaux du traitement – puisqu'il existe des effets secondaires et des contre-indications – et la nécessité du consentement, faute duquel le traitement risque d'être inefficace ? Dès lors que le refus expose à des sanctions, le traitement médical me semble une solution très insuffisante.

Une fois encore, j'emprunterai ma conclusion au rapport Lamanda : « Il semblerait, en toute hypothèse, qu'un consensus se dégage sur la quasi-impossibilité d'appliquer un traitement médical efficace à un criminel pervers au sens psychiatrique du terme. Sans prendre parti sur ces controverses, il apparaît, en l'état des données actuelles de la science, qu'il serait hasardeux de faire reposer les programmes de prévention de la récidive uniquement sur ce type de prise en charge médicale. »

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