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Intervention de Jean-Paul Garraud

Réunion du 18 novembre 2009 à 15h00
Réduction du risque de récidive criminelle — Article 4, amendement 69

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Paul Garraud :

Cette question est en effet l'objet d'un vrai débat. Je me souviens d'une discussion analogue au cours de l'examen du projet de loi relatif à la rétention de sûreté, en février 2008. Le texte initialement proposé prévoyait des conditions : non seulement une peine minimale de quinze ans de réclusion criminelle devait être prononcée, mais l'application éventuelle de la rétention de sûreté était liée à l'âge de la victime. Il était indiqué que celle-ci ne pouvait être que mineure, en l'occurrence âgée de quinze ans au moins. La question s'était alors aussi posée de l'éventuelle inconstitutionnalité du texte.

Déjà, au cours de la discussion qui a suivi, j'étais de ceux qui considéraient que la rétention de sûreté ne saurait être limitée à l'application des cas où la victime est mineure. La dangerosité de l'auteur d'actes entraînant une condamnation d'au moins quinze ans de réclusion criminelle est indépendante de l'âge de la victime. L'Assemblée avait d'ailleurs retenu que l'on ne pouvait fonder le dispositif en question sur l'âge de la victime et l'avait donc étendu aux cas où lesdites victimes étaient majeures. Le présent débat offre des similitudes.

Ainsi, la commission propose de porter à quinze ans de réclusion le seuil au-delà duquel on peut appliquer la rétention de sûreté, à dix ans pour la surveillance de sûreté et à sept ans pour la surveillance judiciaire. Il est vrai que la commission propose une extension du dispositif ; nous considérons néanmoins qu'il appartient à l'autorité judiciaire de disposer de cette possibilité à son gré ; à elle, par conséquent, de se saisir de cette possibilité ou non.

J'ai en mémoire des cas très récents comme celui de Mme Hodeau : l'auteur présumé du crime a été condamné non à quinze ans de réclusion criminelle mais à onze ans. Ce cas précis ne serait pas concerné par les dispositifs proposés – rétention de sûreté, surveillance de sûreté et surveillance judiciaire – s'ils ne s'appliquaient tous qu'à partir d'une peine d'au moins quinze ans. Dans cette hypothèse, il ne serait même pas possible de décider l'application d'une surveillance de sûreté ou d'une surveillance judiciaire.

Le Conseil constitutionnel aura certainement à vérifier la constitutionnalité de ce projet, comme ce fut le cas pour le texte qui a abouti à la loi du 25 février 2008. Cependant, la gradation proposée, qui fait correspondre une mesure de sûreté plus ou moins contraignante à la durée de la peine prononcée, me paraît totalement logique et, de plus, permet de couvrir, au rebours du texte initial, le cas de gens dangereux.

Ce texte est l'aboutissement d'une évolution législative qui a commencé il y a plusieurs années et qui a suscité de nombreux travaux – ce pourquoi je m'élève contre ceux qui prétendent que nous légiférons sous le coup de l'émotion. Il nous appartient d'aller au bout de notre logique, faute de quoi, demain, de nouveaux cas risquent de se présenter et l'on nous demandera quelles dispositions nous avions prévues pour y parer. Imaginons un individu condamné à quatorze ans de réclusion criminelle et qui présente toujours une véritable dangerosité à l'issue de sa peine : nous ne pourrons pas le placer en rétention de sûreté ni même en surveillance de sûreté si nous n'étendons pas le champ d'application du texte.

J'ai cité hier quelques exemples d'individus dont nous savons qu'ils recommenceront, de détenus, heureusement rares, qui l'annoncent même. Imaginons donc l'hypothèse d'un individu condamné à quatorze ans de réclusion, auquel on n'aura accordé aucune réduction de peine, qui n'aura bénéficié d'aucun aménagement de peine parce que tout le monde sait qu'il est dangereux ; eh bien, au bout du bout, nous ne pourrons même pas le placer, j'y insiste, en surveillance de sûreté.

C'est pourquoi je considère que nous devons aller au bout de notre logique maintenant.

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