Il faut se demander tout d'abord, pour répondre à Mme Barèges, si le débat sur la rétention est réellement derrière nous. Nous considérons que non.
D'abord, la première partie du projet de loi que nous examinons est bien la suite de la loi sur la rétention. Je veux quand même rappeler, ce qui nous a surpris dans le principe, que le Conseil constitutionnel a été amené à inventer un nouveau concept entre peine et mesure de sûreté et à préciser les conditions d'application de cette loi.
La première des réponses est de considérer que ce texte ne s'applique que pour des faits commis postérieurement à son adoption, ce qui, d'après M. Lamanda, signifiait que l'on connaîtrait les premiers cas d'application de premier degré dans onze ou douze ans. Or, entre-temps, il a été prévu que les personnes qui n'auraient pas respecté les mesures de surveillance judiciaire ou de surveillance de sûreté puissent se voir appliquer immédiatement ces dispositions.
Je passe sur la caricature qui consiste à faire croire que nous ne sommes pas sensibles à ces crimes affreux. Nous sommes, bien sûr, aussi préoccupés que vous. Simplement, nous nous demandons si la réponse pénale peut constituer la réponse principale. Le problème se pose bel et bien puisqu'une personne a déjà été condamnée. Les arguments de Dominique Raimbourg devraient tous nous amener à prendre conscience que les décisions pénales sont là pour palier la carence de l'institution psychiatrique. Je vous renvoie à ses propos sur l'évolution de la psychiatrie où le milieu ouvert est devenue la seule règle à partir des années soixante-dix. Il faut bien constater l'absence d'institutions qui auraient pu répondre à ce problème.
Pour des pathologies de cette gravité, nous estimons que la réponse ne passe pas uniquement par la réponse pénale. Pour autant, nous ne considérons pas qu'il faille définitivement abolir les procédures d'internement d'office. Il y a d'autres garanties à apporter. À tout le moins, nous nous gardons d'entretenir la confusion des genres.
Depuis des années, certains essaient de vendre le concept de dangerosité. Une grande majorité de la droite y résistait, il y a quelques mois encore. Depuis sept ans, jamais le Gouvernement n'avait accepté d'entrer sur ce terrain, même si M. Garraud et d'autres n'ont eu de cesse de vouloir l'y entraîner. Mais la pression des événements est telle aujourd'hui que cela apparaît désormais à vos yeux comme la seule solution. C'est une erreur. C'est ce que nous tentons de vous faire comprendre à travers ce débat.
Tout milite en faveur d'une position d'extrême prudence à l'égard du concept de dangerosité. M. Urvoas en a donné plusieurs définitions et la lecture du rapport ne permet pas d'être plus avancé même s'il fait bien le point sur la situation. Un magistrat qui aurait à trancher sur le fondement des concepts contenus dans ce projet de loi et dans la loi de février 2008 aurait besoin de bien du courage, car il s'agit de tout sauf de droit. Le rapport de M. Garraud ne lui donnerait aucune indication si ce n'est peut-être une intuition.