Pour éclairer les travaux de la commission des Lois, je souhaite à mon tour vous faire part de ma position, après l'échange que j'ai eu ce matin avec Jean-Marc Ayrault en Conférence des Présidents.
Cette affaire nous amène à nous poser la question majeure de ce que doit être une commission d'enquête. Ce matin, le groupe communiste a souhaité savoir s'il pouvait demander la création d'une commission d'enquête sur France Télécom. À mon sens, aucune des deux demandes de création d'une commission d'enquête ne se justifie.
S'agissant de la proposition de résolution du groupe SRC, la logique de la séparation des pouvoirs doit être comprise de manière stricte. Le Président de la République n'est pas responsable devant le Parlement, contrairement au Gouvernement.
En revanche, le Parlement est compétent pour le contrôle des comptes, comme le prévoit la loi organique relative aux lois de finances. Ce contrôle peut également être effectué par la Cour des comptes. Celle-ci a fait savoir qu'elle n'a constaté aucune irrégularité et a formulé des recommandations qui seront suivies. Le Parlement s'est également saisi de la question : la commission des Finances a convoqué, de manière inédite, les collaborateurs du Président de la République qui ont donné plus d'éléments que la Présidence de la République n'en a jamais fournis. J'ai regretté à cette occasion de ne pas avoir pris ce type d'initiative sous les présidences précédentes.
Si le Parlement va au-delà des informations qu'il a reçues et qui ont permis de vérifier la régularité de l'utilisation de l'argent public, notamment le respect du budget voté et de la séparation entre l'ordonnateur et le comptable, il s'engagera dans un contrôle d'opportunité, qui relève de la politique politicienne et non d'une commission d'enquête. Nous nous sommes posés des questions similaires pour le choix des sujets d'études du Comité d'évaluation et de contrôle (CEC), qui doit engager une démarche d'évaluation conjointe de la majorité et de l'opposition et non de politique partisane.
En conséquence, j'invite mes collègues à ne pas adopter la proposition de résolution et, plus largement, à engager au sein de la commission des Lois une réflexion sur la vocation des commissions d'enquête. Elles ne doivent pas être un outil supplémentaire pour l'opposition aux fins de faire de la politique politicienne. Elles doivent, en outre, être réservées aux affaires graves, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Les sujets que l'opposition propose dans le cadre du droit de tirage doivent être de vrais sujets. À l'inverse la commission d'enquête sur la libération des infirmières bulgares n'a pas fait de découvertes passionnantes et ses travaux n'ont rapidement réuni qu'un nombre très limité de députés. Quand on choisit des sujets qui manquent d'épaisseur, on ne peut pas avoir une commission d'enquête fructueuse.